« Bertrand Cantat-Marie Trintignan : l’Amour à mort » : c’est la sortie prochaine de ce roman, lequel revient sur le « drame de Vilnius » qui coûta la vie à l’actrice mais aussi sur les relations ambiguës que le chanteur entretint avec ses compagnes, qui remet sur le devant de la scène la potentielle violence, voire la folie, de celui que, longtemps, nous avons préféré ne pas voir comme un assassin.
En outre, le livre reproduit dans son intégralité un message téléphonique dans lequel Kristina Rady, la mère des enfants de Cantat, se plaint auprès de ses parents du comportement de celui-ci après qu’ils eurent réaménagé ensemble, le chanteur ayant alors purgé sa (courte) peine.
« Hier, j’ai failli y laisser une dent. (…) mon coude est complètement tuméfié et malheureusement un cartilage s'est même cassé, mais ça n'a pas d'importance tant que je pourrai encore en parler.
Déjà à plusieurs reprises j'ai échappé au pire. Bertrand est fou. (…) Et tout le monde, bien sûr, dans la rue le considère comme une icône, comme un exemple, comme une star, et tout le monde désire que pour lui tout aille bien, et après il rentre à la maison et il fait des choses horribles avec moi devant sa famille. »
Voici, en substance, le contenu de ce message laissé quelques mois seulement après que la jeune femme fut retrouvée par son propre fils Milo pendue dans la chambre qu’elle occupait au-dessus de celle de Cantat dans leur maison bordelaise.
Ce qui est étonnant, c’est que cette même conversation avait été relatée avec la même précision par l’hebdomadaire Paris Match en novembre dernier, sans que nul ne s’en offusque particulièrement, alors que les parents de Krisztina eux-même avaient souhaité la rendre publique, sans même témoigner d’animosité envers le père de leurs petits-enfants (dont on n’ose imaginer le traumatisme aujourd’hui). Pour quelle raison un tel « scoop », lequel eût dû être relayé par tous les médias à l’heure où un simple « allô » offre à son auteure une 4e de couv dans Libé, a-t-il été dédaigné de la sorte par la presse dans son ensemble ? Comme Kristina le soulignait elle-même, « Bertrand est une star, et tout le monde désire que tout aille bien pour lui. »
Tout le monde, même nous, donc, qui avons si peu crié à l’assassin lorsque Marie Trintignan est décédée sous ses coups, préférant ne retenir que la version selon laquelle elle aurait fait une mauvaise chute sur un radiateur au cours d’une querelle d’amoureux avinés qui aurait mal tourné.
Polanski contraignant une fillette de treize ans à un rapport anal dans la propriété de Jack Nicholson, Chris Brown jugé pour avoir écrasé à plusieurs reprises la tête de sa compagne d’alors, Rihanna, contre la portière de la voiture de luxe, Oscar Pistorius laissé en liberté (sous caution, certes) après le meurtre de sa petite amie, Jean-Luc Lahaye condamné pour avoir eu des relations sexuelles avec une mineure de moins de quinze ans, Mel Gibson menaçant de mort son ex, Cheb Mami séquestrant sa compagne deux jours durant pour la faire avorter de force, Joey Starr qui cumule violences conjugales (double fracture du nez à son actif tout de même) et gifle, crachat et coup de poing sur hôtesse de l’air…
Pourtant, face à ces atrocités domestiques, nous préférons bien souvent fermer les yeux, et pardonner à ces grands hommes leurs égarements au nom d’un talent souvent certain mais qui, pourtant, ne devrait nullement minimiser ces actes que, chez un quidam, on condamnerait "avec la plus grande fermeté".
Resterons-nous définitivement toutes et tous soumis à une virilité triomphante portée par la divine célébrité alors que la lutte contre les violences faites aux femmes et pour l’égalité des sexes ne cesse, et c’est heureux, de progresser ?
Espérons que non…