Alors que le Brexit se prépare, un milliardaire misogyne et raciste s'apprête à prendre la tête de la première puissance mondiale tandis qu'on rendait hommage il y a quelques jours aux victimes des attentats du 13 novembre : difficile, face à tout cela, de ne pas éprouver de la colère. Au contraire, c'est son absence qui aurait été inquiétante, étant donné que ce sentiment est une réaction naturelle pour faire face à une situation qui nous blesse, nous effraie ou que l'on ne comprend pas. C'est une émotion puissante, qui peut pousser au changement, en canalisant nos frustrations dans un moyen d'action.
Cependant, il y a une limite à ne pas franchir : on a vite fait de se vautrer dans la violence de cette émotion et de devenir haineux. Le hashtag nauséabond lancé sur Twitter par des opposants de Trump, #RapeMelania, et qui incite au viol de la femme du magnat immobilier pour le punir de sa victoire, est un parfait exemple des dégâts causés par la haine. Car si la colère peut être positive, la haine est toujours destructrice, aveugle et violente. Meredith Bergman, médecin holistique à New York, a donc confié au site Well and Good ses conseils inspirés de la philosophie bouddhiste pour apprendre à assainir sa colère. Petite prescription pour mieux gérer notre négativité et notre émotivité en cette période difficile.
Pour parler de la négativité, Meredith Bergman cite un proverbe bouddhiste très parlant : "S'accrocher à sa colère revient à attraper un charbon ardent pour le lancer sur quelqu'un : au final, il n'y a que vous que ça brûle". Car quand la colère naît de l'impuissance ou de l'injustice, elle ne peut, par définition, trouver d'exutoire direct ou évident. Et à force de la contenir, elle nous empoisonne, au sens propre comme au sens figuré : il a été prouvé qu'une flambée de cortisol (l'hormone du stress sécrétée pour réagir aux émotions négatives) peut déclencher de nombreuses inflammations, et aurait même un lien direct avec de nombreux cancers, maladies cardiaques et auto-immunes ! Il faut donc apprendre à gérer sa colère pour éviter de se noyer dans la haine.
Bien évidemment, on ne vous demande pas de jouer les Candide et de répéter que tout est pour le mieux dans le meilleur des monde. Il ne s'agit pas de se transformer en imbécile heureux, mais de savoir maîtriser et apaiser sa frustration grâce à ces trois clés afin d'éviter qu'elle nous ronge.
"Je pense qu'on se sent tous un peu désorientés, les choses sont un peu folles en ce moment. Comment restez-vous sain dans un monde qui perd la tête ?", s'interroge le Dr Bergman dans son interview pour Well and Good. Mais si notre colère est saine et justifiée, il n'en demeure pas moins que nous devons apprendre à la dompter jusqu'à la rendre inoffensive.
Pour cela, il faut d'abord accepter cette émotion parfois difficile à gérer. Nier notre colère ou la rejeter ne ferait que l'empirer : le mieux est de prendre le temps de l'analyser sous toutes les coutures. Un peu d'introspection permet d'apprendre à tolérer un sentiment, et à mieux le maîtriser. C'est donc une étape primordiale pour faire barrage à la haine : cet étiquetage émotionnel nous permettra de réfléchir aux raisons de notre frustration, mais aussi de trouver comment l'utiliser de manière productive.
Pour ne pas vous faire dévorer par la colère et vous retrouver tout à coup à insulter des inconnus sur Twitter à coups de lettres majuscules des plus menaçantes, il faut apprendre à gérer votre frustration en vous appuyant sur votre entourage. Il n'y a qu'en ouvrant un peu les vannes avec des gens qui vous connaissent et vous aiment que vous pourrez canaliser votre colère.
Il est parfois dur de partager son mal-être avec ses proches, alors que la société fait régner une insupportable dictature du bonheur et du sourire d'apparat. De Facebook, qui a mis 10 années à proposer à ses utilisateurs de répondre autrement que par un"J'aime" d'une positivité souvent déplacée, aux injonctions des magazines féminins qui nous apprennent à garder le sourire, éviter les coups de mou, et être heureuse 365 jours sur 365, la société a rendu taboues les émotions négatives. On s'adonne avec plaisir à l'exercice de style qui consiste à râler à tout va contre les Parisiens, la pluie et la SNCF, mais on accorde peu de place à la véritable colère. Et pourtant, c'est indispensable, car cette dernière se nourrit de silence : moins vous en parlerez, plus vous aurez le sentiment d'être seule avec ce poids, d'être déconnectée des autres. Et de cet isolement naît une frustration supplémentaire, qui vous fait tendre vers un point de rupture.
Pour que votre colère ne "déborde" pas, parlez-en, donc : cela allégera votre fardeau et vous permettra de prendre un peu de recul sur vos émotions et votre situation. L'union fait la force, paraît-il !
Pour Dr Bergman, si vous commencez à être haineux, c'est un signal d'alarme à ne pas ignorer. Cela trahit un mal-être général qu'il ne faut pas sous-estimer. C'est donc le moment de prendre soin de soi, de reconsidérer vos besoins physiques, émotionnels et spirituels.
Faites du sport, passez du temps avec des amis, partez en week-end, mangez mieux, dormez davantage... Ces petites choses vous aideront à contrebalancer votre négativité, à l'empêcher de contrôler toutes vos réactions et de s'infiltrer dans votre quotidien. Combattre la haine par l'amour et le bien-être, c'est un peu cliché, mais ça demeure efficace - et on aime bien la symbolique.