Vos parents vous l'ont répété des centaines de fois : parler dans le dos des gens, ça ne se fait pas. Alors certes, ce n'est peut-être pas l'activité la plus classe du monde, mais cela nous permettrait d'être beaucoup plus à l'aise dans nos baskets. Lors d'un récent festival scientifique organisé au Royaume-Uni, Robin Dubar, professeur de psychologie évolutionniste à l'université d'Oxford, a en effet révélé que colporter des ragots avait un effet positif sur notre vie sociale, et donc notre bien-être. Et qui dit bien-être, dit aussi bonne santé et plus grande espérance de vie. Concrètement, être une commère nous rend humain. Cela permet de sélectionner les personnes en qui nous avons confiance et de tisser des liens amicaux forts. Grâce aux potins, nous élargissons notre réseau social (le vrai hein, pas Facebook), ce qui est très important pour notre bien-être.
Le professeur Robin Dubar explique : "Votre réseau social a un effet énorme sur votre bonheur. Cela peut avoir un impact sur tout, sauf peut-être votre addiction au tabac. Le problème est de maintenir ce réseau. Le langage a évolué pour permettre à notre réseau de rester fluide, pour nous permettre de faire des rencontres, et de raconter des histoires qui sont importantes pour la cohésion de la communauté".
Jennifer Cole, maître de conférences en psychologie à l'université de Manchester, va même plus loin en assurant que nous avons carrément tendance à nous méfier de celles et ceux qui ne jouent pas le jeu des commérages. Elle indique : "Lorsqu'on raconte des potins, on sait qu'on viole la vie privée de quelqu'un et qu'on enfreint les règles sociales sur la politesse. Mais si les gens ne racontent pas de ragots du tout, nous avons tendance à ne pas les aimer. On se montre suspicieux. Ce que l'on préfère, ce sont les personnes qui jouent les commères, mais juste un peu. Le lien social est tellement important, c'est pour cela que les ragots comptent". Toutes vos soirées passées devant Gossip Girl vont enfin vous servir à quelque chose.
A lire tout ça, vous commencez à vous dire que balancer n'importe quoi sur n'importe qui va vous permettre de vivre heureuse et centenaire ? Malheureusement, les choses sont un peu plus compliquées que ça. Selon Jennifer Cole, il faut bien faire différence entre le ragot à l'impact positif et celui à l'impact négatif. Ainsi, si vous êtes du genre à propager les bonnes nouvelles, vous serez vue comme une personne qui entretient les relations entre les membres de son réseau social ou de sa famille. Mais si vous aimez vraiment casser du sucre sur le dos des autres, cela peut se retourner contre vous : "Parler sur le dos des gens nous donne l'impression d'être puissant, mais c'est très fragile. Si vous avez la réputation de quelqu'un qui propage des ragots négatifs, vous pouvez être exclu de votre cercle social – dans ces cas-là, les effets positifs du commérage sont donc inversés".
On pourrait ainsi prendre pour exemple le bad buzz qui entoure Gossip, cette application qui permet de poster et consulter anonymement des ragots sur nos contacts Facebook. Si le but premier de la plateforme était de "démocratiser les potins", son succès a engendré pas mal de problèmes dans les cours de récrées des lycées et collèges. Accusée d'encourager le cyber-harcèlement, Gossip est maintenant décriée de toute part. Preuve s'il en est que parler sur le dos des autres peut vraiment se transformer en jeu dangereux.
Le professeur Robin Dubar conseille donc aux commères de service "d'équilibrer" leur façon de balancer des potins : "Donnez aux autres de délicieux petits morceaux. Mais n'en faites pas trop". Ou quand ouvrir sa grande bouche peut rapidement pousser son entourage à l'indigestion.