Après avoir fait la liste des dix femmes qui ont le plus marqué l'année et celle des dix plus gros machos de 2018, nous vous proposons la liste des moments où les femmes se sont soulevées pour dire non.
Pour les femmes à Cannes en 2018, il y a eu plusieurs moments forts. Le premier lors du discours d'ouverture de Kate Blanchett, puis quand Kristen Stewart a enlevé ses escarpins pour protester contre l'obligation des femmes à porter des talons sur le tapis rouge.
Il y a aussi eu la présentation du film Rafiki de la Kenyanne Wanuri Kahiu, une histoire d'amour entre deux jeunes filles qui a été en partie censurée au Kenya.
Le 12 mai, ce sont 82 femmes, réalisatrices, actrices ou productrices, qui ont monté symboliquement les marches pour représenter les 82 films réalisés par des femmes et invités en compétition depuis la création du festival, il y a 70 ans, soit seulement 5 % de la sélection. On compte également une seule lauréate en 70 ans, Jeanne Campion pour La leçon de Piano en 1993.
L'autre moment fort de la quinzaine fut la montée des marches des 16 autrices du livre Noire n'est pas mon métier. Ces actrices demandent une plus grande diversité de rôles dans les films.
Jeudi 27 septembre, une professoresse d'université, encore inconnue quelques jours plus tôt, est venue s'exprimer devant le Sénat américain après des décennies de silence. Christine Blasey Ford accuse un juge, Brett Kavanaugh, de tentative de viol lorsque tous les deux était adolescents.
Il est alors candidat comme juge à la Cour Suprême des États-Unis, un poste qu'il détiendra à vie. La Cour Suprême a un grand rôle dans la fabrication des législations aux États-Unis et Brett Kavanaugh a des positions très conservatrices qui lui ont attiré la désapprobation des féministes. En entendant que Brett Kavanaugh allait peut-être devenir juge à cette cour, Christine Blasey Ford a voulu témoigner mais il finira quand même par être élu à ce poste.
Le 25 mai, l'Irlande votait pour changer sa constitution afin de légaliser l'avortement. Les Irlandais·es devait décider pour ou contre la suppression de l'article 8 qui consacrait le droit à la vie dans la loi.
Le "oui" l'a emporté à 66 % pour la suppression de cette article, ouvrant la voie à un changement de législation. La loi a officiellement été votée le 13 décembre au parlement irlandais, autorisant l'avortement à toutes les Irlandaises et leur épargnant enfin de coûteux déplacements au Royaume-Uni. Les yeux se tournent maintenant vers l'Irlande du Nord.
Pendant les fêtes San Firmin de Pampelune, en 2016, cinq hommes violent une fille de 18 ans, se filment et postent la vidéo sur leur groupe WhatsApp. Ils s'étaient eux-même baptisés la Manada, la Meute, en français.
La qualification de viol avait été abandonnée le 26 avril 2018 par le tribunal pour être requalifié en simple "abus".
Condamné à 9 ans de prison, les cinq hommes ont été libérés en juin sous contrôle judiciaire contre une caution de 6 000 euros chacun. Cette décision a fait descendre des milliers d'Espagnol·es dans la rue le 26 juin. Des manifestations sans précédent dans le pays.
Le parquet trouvant la condamnation trop clémente, a fait appel de la première décision du tribunal, il devrait y avoir un nouveau procès.
L'Arabie saoudite a, en grande pompe, annoncé plusieurs réformes concernant les femmes cette année. Elles ont pu se lancer dans la création d'entreprise ou avoir le droit de conduire. Mais ce que le pays cache derrière ces maigres avancées qu'on pourrait qualifier de minimum, c'est l'emprisonnement de militantes pour les droits humains et notamment des militantes pour les droits des femmes.
Depuis le mois de mai, elles sont plusieurs a être enfermées et neuf aujourd'hui en attente d'un éventuel procès. Parmi elles : Aziza Al-Youssef, Hatoun Al-Fassi, Lujain Al-Hathloul, Iman al-Nafjan, Samar Badawi, Nassima al-Sada, Mayaa al Zahrani, Nouf Abdulaziz, Amal al Harbi.
Les nouvelles ne sont pas bonnes, puisque des témoignages, dont celui du père de Lujain Al-Hathloul, confirment que trois des neuf militantes ont été torturées en prison. Amnesty International fait état de témoignages qui précisent qu'une d'entre elles a été suspendue au plafond, qu'une autre a été harcelée sexuellement par des bourreaux masqués. Elles auraient aussi été électrocutées et flagellées.
Pour avoir voulu se soulever et demander des droits, ces femmes sont aujourd'hui en prison pour trahison.
Le 23 septembre, Muriel Robin signait, avec 87 autres personnalités du cinéma, la pétition "Celles qui sont encore vivantes", pour demander de réelles actions contre les violences conjugales. Son lancement précédait de quelques jours la diffusion sur TF1 d'un téléfilm sur l'affaire Jacqueline Sauvage, jouée par Muriel Robin.
Dans cette aventure, la comédienne n'est pas seule, elle est accompagnée de la militante Karine Plassard et de l'actrice Eva Darlan.
Le 6 octobre, elles avaient réussi à réunir devant le tribunal de Paris, à la Cité, plusieurs centaines de manifestant·es pour se faire entendre. Le 13 décembre, elles avaient été reçues par le Premier Ministre Édouard Philippe, qui ne leur avait cependant rien promis quant à l'augmentation des budgets pour la lutte contre les violences faites aux femmes.
Eva Darlan qui demandait 1 milliard d'euros dans le Journal du Dimanche avait proposé de lancer les gilets violets pour se faire entendre.
Contre la politique de Trump et la déliquescence d'un parti démocrate en perdition, une nouvelle génération de femmes se soulèvent aux États-Unis. Elles étaient déjà 257, un nombre record, à se présenter au Congrès, avec des figures comme Stacey Abrahams ou Ilhan Omar.
Beaucoup se sont présentées comme gouverneuses d'État, dont des figures comme Christine Hallquist ou Paulette Jordan. Et un nombre record d'entre elles a également été élu et occuperont en janvier 23,6 % des sièges au Congrès, qui rassemble la Chambre des représentant·es et le Sénat.
Fin septembre, l'ancienne actrice Tanushree Dutta, 34 ans, relance ses accusations contre Nana Patekar, un acteur influant du cinéma indien qui a 67 ans aujourd'hui. Elle l'accuse de l'avoir harcelée sexuellement lors d'un tournage en 2008.
Traumatisée par ces expériences, elle a ensuite décidé d'arrêter le cinéma. Tanushree Dutta a fini par porter plainte pour harcèlement sexuel le 6 octobre. Pour la défendre, des actrices comme Priyanka Chopra ou Sonam Kapoor l'ont soutenue via les réseaux sociaux.
Suivant sa plainte, d'autres affaires ont éclaté en Inde dans le monde du cinéma mais aussi dans les médias et la politique. Une vague de journalistes ont par exemple dénoncé les agissements d'hommes journalistes. S'en est suivie la démission du rédacteur en chef de l'Hindoustan Times, le 8 octobre. Quelques jours plus tard, le 17 octobre, c'est le ministre des affaires étrangères qui démissionne après les accusations d'une vingtaine de femmes.
Cet été, l'actrice star de télénovela de 29 ans Eileen Moreno, avait complètement disparu des radars. Le 13 septembre, elle a dévoilé une photo de son visage tuméfié, une main sur un oeil et le nez couvert de pansements.
A l'origine de ces blessures, elle accuse son conjoint Alejandro García. Acteur comme elle, il l'aurait battue le 23 juillet pour avoir refusé de lui montrer des textos sur son téléphone alors que le couple était en voyage au Mexique.
Sur son Instagram, Eileen Moreno a appelé ses abonné·es à ne plus se taire face aux violences conjugales. Des centaines de personnes partout en Amérique du Sud se sont photographiées une main devant l'oeil en signe de soutien à Eileen Moreno, et pour dénoncer ces violences avec les mots-clefs #YoSiDenuncio ("Je dénonce") ou #NiUnaMas ("Pas une de plus").
Le 24 novembre, la France a vu 50 000 personnes descendre dans les rues et se soulever contre les violences faites aux femmes. Un rapport publié au mois de novembre dénonce le manque criant de moyens mis en oeuvre par le gouvernement pour lutter contre ces actes.
De 80 millions d'euros par an aujourd'hui, il en faudrait 500 millions minimum et 1 milliard pour satisfaire tous les besoins. Une femme meurt tous les trois jours sous les coups de son conjoint en France.