"Il doit être arrêté. Parce qu'il y en a plein des comme ça. Certains se réveillent le matin et ils se disent : Je vais aller frotter des filles dans le métro". C'est en ces mots que Safiétou évoquait son agresseur à Terrafemina. Lors d'un trajet, ligne 7, il s'était masturbé face à elle. Discrètement, elle l'avait filmé. Nous étions alors le 12 décembre 2018. Il a finalement fallu attendre ce 17 juin 2019 pour que son procès ait lieu au tribunal correctionnel de Paris.
Verdict ? Une condamnation de huit mois avec sursis pour exhibition sexuelle et outrage sexiste, assortie d'une amende de cinq-cent euros pour préjudice moral. Cet homme de 47 ans au casier judiciaire vierge, dénommé Munir, n'en était pas à son premier fait accablant. Suite à la publication de sa vidéo sur Twitter, Safiétou avait reçu plusieurs témoignages de femmes évoquant le même agresseur, ce qui l'avait incitée à porter plainte pour exhibition sexuelle le 16 décembre 2018, provoquant ainsi l'ouverture d'une enquête.
"Les filles, les transports en commun ne sont PAS une jungle où la loi s'efface: portez plainte !", a en ce sens déclaré son avocate.
Le procès qui s'est tenu opposait au prévenu une autre victime, dénommée Hortense, témoignant des mêmes actes - exhibition et masturbation en plein transport. Cependant, ce dernier n'a pas reconnu ces faits. Comme l'indique la journaliste Felicia Sideris, présente au procès, l'homme, qui jusqu'ici travaillait au McDonalds de l'avenue des Champs-Élysées, aurait déjà été licencié d'une précédente profession "pour avoir tenté d'embrasser de force deux femmes en décembre puis février 2015". Selon la présidente du tribunal, ''le sexe envahit toute [sa] mentalité''.
Pour Safiétou, vingt ans, prévenir la RATP de ces agissements n'était pas simplement une forme de défense personnelle. Sous son acte viral, la jeune femme a incité les internautes à "balancer" leurs agresseurs sur les réseaux sociaux, afin de couper la chique à ceux qui les accusent d'exagérer, de mentir ou de se "victimiser". Les mots ne suffisent pas ? Les vidéos suivront.
"Je veux montrer aux gens que ça existe vraiment et que ça n'est pas des mythes" expliquait-elle à propos de ces images retweetées plus de trente-six mille fois. De l'agression en pleine rue de Marie Laguerre à celle, transphobe, de Julia, les vidéos et leur diffusion massive semblent (hélas) toujours plus nécessaires pour révéler les violences les plus édifiantes.
A travers ses threads qui ont suscité des milliers de réactions, Safiétou dénonce la banalisation d'une situation inacceptable mais plus courante qu'on ne le croit au sein des transports en commun. Ce faisant, elle épingle l'insupportable sentiment d'impunité qui en émane. Aujourd'hui encore, il n'est d'ailleurs pas rare que la jeune femme reçoive des témoignages d'internautes ayant vécu la même situation.
Sur Twitter, six mois après l'initiative indignée de Safiétou, la parole se libère de plus en plus, des voix anonymes aux collectifs féministes comme #NousToutes et Les Effronté·es, notamment pour dénoncer l'inadaptation de la RATP à la protection de ses usagères. Le tout cinglé d'un hashtag-choc : #BalanceTonMétro.