Les juges seraient plus indulgents avec les femmes. C’est en comparant les sanctions prononcées à l’encontre d’hommes et femmes lors de la comparution immédiate de 1228 prévenus que deux universitaires lillois sont arrivés à cette conclusion. Pour Thomas Léonard, attaché temporaire d’enseignement et de recherche à l’université de Lille II et coauteur de l’étude, interrogé par le journal La Croix, les conclusions sont sans appel : « Les femmes bénéficient plus souvent d’une relaxe. Quand elles sont condamnées à de la prison, c’est le plus souvent assorti de sursis, et quand elles écopent d’une peine ferme, le quantum est en moyenne moins élevé que celui des hommes. »
Pour les auteurs de l’étude, les juges se montreraient d’une part plus sensibles au sort des mères de famille : « Les juges interrogent longuement les femmes sur leur situation familiale, sur la nature des liens tissés avec leurs enfants, etc. Les magistrats se comportent très différemment avec les hommes : ils leur demandent s’ils ont des enfants et passent ensuite à la question suivante, comme si la détention d’un père de famille ne portait pas à conséquence sur la vie de ses proches. »
D’autre part, les magistrats auraient aussi selon les universitaires « du mal à se départir de certaines idées reçues, notamment celle qui veut qu’une femme soit – a priori – une victime, et ce même lorsqu’elle est déférée devant la justice, ajoute Thomas Léonard. De façon un peu manichéenne, on a l’impression que pour les juges, les délinquants hommes « font » problème alors que les délinquantes femmes « ont » des problèmes. »
Un traitement différentiel que reconnaît Laurence Tinseau, vice-présidente du TGI de Pontoise (Val-d’Oise, dans le quotidien : « Au fond, nous sommes toujours un peu surpris d’avoir à juger une femme, c’est tellement rare ! Devant ces prévenus atypiques, peut-être tentons-nous davantage de comprendre ce qui a pu les amener là et de mettre au jour les raisons économiques, sociales, psychologiques les ayant amenées à enfreindre la loi. »
Enfin, selon les auteurs, la « plus grande déférence » dont les femmes feraient preuve lors des audiences serait « forcément bien vue ». Mais la féminisation de la magistrature n’aurait aucun lien avec la clémence des peines prononcées contre les délinquantes, elle en aurait en revanche une sur les jugements, selon Thomas Léonard : « Les femmes juges se montrent plus répressives dans les affaires d’atteintes aux personnes et plus clémentes dans les affaires d’atteinte aux biens ».
(1) Enquête publiée dans « Penser la violence des femmes », sous la direction de Coline Cardi et Geneviève Pruvost (Éd. La Découverte).
Source : lacroix.com
Crédit photo : Zoonar
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