L’article du New York Mag se réfère, entre autre, à l’utilisation que font beaucoup d’hommes, mais aussi de femmes, de l’expression « bitch ». « Alors, bitch, qu’est-ce que tu fous ce soir ? », il n’est pas rare que les copines, entre elles, se traitent de salope, de pute ou de bitch avec la plus grande tendresse, simplement pour faire cool. La faute à Kanye West qui, pour clamer son amour pour Kim Kardashian, annonça dans une chanson composée exprès pour elle, « Perfect Bitch », avoir enfin trouvé la « parfaite salope » ? Et pourquoi pas ?
Car si les rappeurs, souvent accusés en premier lieu du pire des sexismes primaires, sont fatalement porteurs d’une image souvent dégradante pour la femme, publicitaires, people, modeux et séries télé ne sont pas en reste, définissant la plupart du temps la femme par sa seule sexualité ou son corps, tout ça avec la dose nécessaire de second degré, of course. Alors que Rihanna n’en finit plus de se désaper pour prouver qu’elle reste la bitch ultime, augmentant chaque jour sa popularité auprès des jeunes femmes du monde entier, les ados surjouent la « duck (dick ?) face » sur leur profil Facebook, toujours « pour rire », bien sûr, des marques comme Forever 21 lancent les tee-shirts sexistes TROP LOL à l’inscription « Je suis trop jolie pour faire mes devoirs, j’ai donc demandé à mon frère de les faire à ma place » et le site masculin ultra-trendy Jooks enfonce le clou avec des articles comme « Ces meufs un peu moches mais qui nous excitent », dont on ne sait plus si on doit en rire ou en pleurer. Quant à la mode et la publicité, on ne compte plus les mises en scène de femmes chosifiées, fragiles, aux corps dénudés ou morcelés. Les stéréotypes, c’est décidément chic !
Tout est question de marketing, de wording et de trendytude, donc. Alors que Terry Richardson fait fièrement poser les héroïnes de Gossip Girl, programme adulé des ados, en mode porno-star, se disputant le plaisir de lécher goulûment une grosse glace symbole du pénis-roi, la série ultra-branchée « Girls » fait tout naturellement dire à son protagoniste : « Yo salope, t'es où ? Tu te fais bourrer la chatte ? ». So swag !
Et pourtant, si la distance ironique assumée du propos est facilement compréhensible par une certaine catégorie de public, elle poussera cependant son ensemble vers la dangereuse pente du : « si tu te marres pas quand on te demande une pipe, t’es une bolosse ». De même qu’on ne dit plus « viol collectif » mais « tournante », vachement plus vendeur, le méta-sexisme, en permettant d’exprimer de manière « cool » une vision à la fois archaïque et hypersexualisé de la femme , ne conduirait-il pas la plus jeune génération, moins perméable à cet « humour », vers un machisme primaire et jusque-là oublié ? LOL
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