Twitter a-t-il sa place dans l'hémicycle ? En plein marathon parlementaire sur le projet de loi ouvrant le mariage aux couples homosexuels, les députés s'en donnent à cœur joie sur les réseaux sociaux, commentant les débats ayant lieu à l'Assemblée, rapportant des anecdotes en direct de l'hémicycle ou critiquant ouvertement leurs adversaires politiques à coups de petites phrases assassines ou ironiques. Les élus se lâchent sur leur fil Twitter, et cette profusion de commentaires en 140 caractères soulève la polémique depuis quelques jours. À tel point que le député UMP Philippe Gosselin a demandé lundi un rappel au règlement au président de l'Assemblée nationale, Claude Bartolone, afin de « réfléchir à la façon dont les députés doivent totalement ou partiellement (...) vérifier l'usage des tweets, gazouillis et autres réseaux sociaux ». « Je pense réellement que ça nuit à la sérénité de nos travaux et assez rapidement à la qualité de la loi. Je voudrais monsieur le Président que vous preniez cet engagement, s'il vous plaît », a-t-il continué. Répondant à la demande de M. Gosselin, M. Bartolone a rétorqué que le rôle du président de l'Assemblée consistait à « veiller au bon déroulement de nos travaux dans l'hémicycle. Ce serait lui demander beaucoup que de veiller aussi à ce qui se dit à l'extérieur ». À noter que M. Gosselin n'est pas en reste sur les réseaux sociaux, live-tweetant frénétiquement les séances de débat à l'Assemblée nationale. « #directAN. #MariageGay. Toujours en séance! De façon continue depuis près de 24h maintenant. Jusqu'au bout nous combattons ce funeste projet! », tweetait-il encore lundi, puis à 6h53 : « #directAN. La séance est levée. Dormir quelques heures, et ça repart ! Fiers des députés UMP/UDI très présents !!! #OnLacheRien ».
Twitter s'était déjà invité dans l'hémicycle avec l'intervention du président du groupe UMP Christian Jacob, qui avait fait un rappel au règlement, basé sur un tweet du député EELV Sergio Coronado à l'encontre d'Hervé Mariton. M. Jacob avait obtenu une suspension de séance censée permettre de ramener « nos collègues de la majorité à la raison et la sérénité ». Depuis, les commentaires sur Twitter n'ont pas tari, M. Coronado se montrant toujours aussi critique : « Quand la droite parle, j'ai l'impression de lire S. Agacinski. Je finis par préférer entendre F. Barjot chanter #DirectAN #mariagepourtous », peut-on lire sur son fil. Chez les socialistes aussi on s'exprime sur les réseaux sociaux. A l'image de la députée PS Corinne Narassiguin qui ironise...
#DirectAN Les députés UMP et UDI absents ce week-end pour voter contre l'art 1 et 2 ont tenté de se rattraper pour leur moment YouTube.
— Corinne Narassiguin (@CorinneNara) 4 février 2013
Ou du député et benjamin de l'Assemblée Olivier Dussopt qui live-tweete de son côté :
Il est presque 5h du matin. On siège depuis 21:30 et #Jacob hurle encore et encore et évidemment en tapant sur les ministres #directan
— Olivier Dussopt (@olivierdussopt) 4 février 2013
Quant à Olivier Faure, il se dit « impressionné par le nombre de citoyens qui suivent à cette heure avancée nos travaux sur #MariagePourTous et qui tweetent ou RT #Directan merci ». Pour la ministre Michèle Delaunay, le fait de voir ces débats relayés par Twitter est « une incroyable leçon de démocratie en direct ».
Du côté de l'opposition, Twitter est également un formidable terrain de jeu pour exprimer ses divergences, comme le montre Yves Jégo :
La tournure des débats #mariagepourtous qui virent à la foire d'empoigne n'est digne ni du Parlement ni du sujet traité #directAN #jemecasse
— Yves Jégo (@yvesjego) 4 février 2013
À croire que les tweets sont désormais des acteurs à part entière du débat parlementaire. Claude Bartolone a d'ailleurs finalement assuré qu'un groupe de travail sera mis en place sur les habitudes de travail à l'Assemblée et qu'il se penchera sur ce sujet. Alors que le wi-fi a été installé dans l'hémicycle cet été seulement, l'invitation des usages numériques au Palais Bourbon n'a pas fini de susciter moult gazouillis de protestation... ou d'approbation.