Offrir une poupée à une garçon pour faire bouger les lignes. Telle est l'idée de Elisabeth Roman, fondatrice du magazine d'empowerment feminin Tchika, qui lance le hashtag #UnPouponPourUnGarçon. Le concept ? Acheter une poupée pour un petit garçon de son entourage (un fils, un petit-fils, un neveu, un filleul...) en vue de Noël et poster la photo du jouet sur les réseaux sociaux, accompagnée dudit hashtag. Après Noël, les familles pourront également poster la photo du garçon avec son poupon chéri.
Une démarche qu'Elisabeth Roman a testée par elle-même en offrant une poupée à deux petits garçons de son entourage. "Le retour a été très positif dans mon cas. Les deux petits garçons n'ont pas hésité un instant avant de prendre le poupon que je leur offrais, ils ont tout de suite voulu jouer avec", nous explique-t-elle.
Au-delà de faire plaisir à un petit garçon, ce mouvement est aussi et surtout une jolie façon de faire évoluer bouger les lignes autour des cadeaux genrés. Car si on encourage de plus en plus les fillettes à s'émanciper des carcans dans lesquels la société a tendance à les enfermer - et heureusement ! -, les clichés qui concernent les petits garçons ont eux aussi la peau dure. "Il faut aussi agir pour les garçons", rappelle Elisabeth Roman. "On sait pertinemment que leur éducation se reflète sur leur façon d'être à l'âge adulte et c'est aussi par des petits gestes que l'on peut faire évoluer les choses."
Une démarche positive pour l'enfant mais aussi pour sa famille. Car comme nous l'explique la fondatrice de Tchika, offrir une poupée à un garçon, "ça lui apprend l'empathie, la douceur, ça l'entraîne aussi à être papa, tonton, parrain... Et surtout ça va faire réagir les familles. L'idée derrière cette démarche, c'est aussi de créer un débat lors de l'ouverture des cadeaux, d'ouvrir en famille une discussion autour de cette thématique."
Un débat qui pourra dépasser le cadre de la famille grâce à l'opération #UnPouponPourUnGarçon : "Avec le hashtag, on espère par ailleurs un effet boule de neige qui permettrait de créer le débat à une échelle plus large que la famille."
Car il suffit de poser la question autour de soi, il semble aujourd'hui plus facile d'offrir un kit de mécano à une petite fille qu'une poupée à un garçon. Un blocage qui serait, selon Elisabeth Roman, dû à la façon dont on perçoit aujourd'hui la masculinité : "Si l'idée de la petite fille forte, qui peut travailler dans les sciences par exemple, fait petit à petit son chemin, celle d'un petit garçon sensible, qui aime jouer à la poupée est plus difficile à faire passer. Et ça parce qu'on ne veut pas qu'un garçon soit sensible, qu'un garçon pleure."
Alors qu'on encourage depuis toujours les fillettes à développer leur côté "sensible", on apprend encore aujourd'hui bien souvent aux garçons à se montrer "forts" et "courageux". Une différence de traitement qui s'opère dès la petite enfance et qui se répercute bien évidemment à l'âge adulte. Derrière cette façon de faire se cache par ailleurs des rôles encore bien établis dans l'inconscient collectif : on encourage davantage les petites filles à jouer avec les poupées car, par conditionnement, on estime encore bien souvent qu'au sein de la famille, c'est à la femme de s'occuper des enfants.
Si offrir une poupée à un garçon ne changera pas la donne du jour au lendemain, c'est un premier pas vers une déconstruction des stéréotypes de genre qui perdurent aujourd'hui. "Avec le hashtag, on veut un message clair et ciblé", poursuit Elisabeth Roman. "Mais dans l'idée, cela peut être bien plus large : on peut offrir un camion à une fille, une dînette à un garçon". Une façon de faire évoluer les mentalités, doucement mais sûrement.