La démarche est tellement rare qu'elle en est d'autant plus précieuse. Car peu d'actrices françaises ont profité du séisme #MeToo initié par leurs consoeurs anglo-saxonnes pour dénoncer les violences sexistes et sexuelles dont elles auraient été potentiellement victimes. Alors que la parole s'est libérée outre-Atlantique suivant la déflagration de l'affaire Weinstein, les comédiennes françaises semblent avoir choisi l'option motus et bouche cousue plutôt que de profiter de cette plateforme massive de sororité. A quelques exceptions près. C'est ainsi que Sandrine Bonnaire rompt le silence, dans les pages d'un livre de témoignages, A l'amour, à la vie, signé de la journaliste Catherine Ceylac.
L'actrice de 52 ans y révèle les dessous d'une "relation toxique" qui aura duré quatre ans. Et y décrit les violences conjugales dont elle a été victime en 2000.
"Ça n'allait plus, nous savions que c'était la fin. Il s'est installé chez moi, je lui ai demandé de partir. J'ai été sympa, j'ai tout fait pour qu'il s'en aille le plus confortablement possible (...) je me suis portée garante pour qu'il puisse prendre un appartement", retranscrit Téléstar qui a pu lire l'ouvrage avant sa sortie le 23 octobre prochain.
"Une triple fracture de la mâchoire et huit dents cassées"
C'est à ce moment-là que tout bascule. Sandrine Bonnaire décrit froidement son cauchemar. "Il m'a strangulée, je suis tombée dans les pommes, et je me suis réveillée avec une triple fracture de la mâchoire et huit dents cassées. A l'époque, on a parlé d'agression et je n'ai pas osé dire que c'était un homme que je connaissais. Je n'en revenais pas qu'il ait pu me faire ça. Je n'ai pas porté plainte tout de suite parce que, sur le coup, il m'a dit que j'étais tombée. (...) Je n'y croyais pas vraiment. Mais je n'avais pas non plus envie de croire qu'il m'avait violentée."
La comédienne encaisse, ne s'ouvre pas à son entourage. Finalement, elle décide de se faire opérer de la mâchoire. Et c'est là que son chirurgien lui révèle l'impensable : "A la fin de la consultation, ce médecin m'a certifié que j'avais été frappée, que je n'étais pas tombée. Tout s'est éclairé. J'ai porté plainte."
Son ancien compagnon et bourreau sera condamné à deux ans de prison avec sursis et une amende conséquente. Quant à Sandrine Bonnaire, aujourd'hui en couple avec le musicien de jazz Erik Truffaz, elle s'est retrouvée avec deux plaques en titane dans la mâchoire, a suivi des séances de rééducation et quatre ans de thérapie pour se remettre de ce traumatisme tant physique que psychologique.
Si elle avait déjà raconté cette agression dans sa biographie Le soleil me trace la route, elle n'avait toutefois pas révélé que son agresseur était son compagnon de l'époque. Une nouvelle preuve que les victimes de violences conjugales peinent à témoigner. En effet, seules 19 % des femmes agressées déclarent avoir déposé une plainte en gendarmerie ou en commissariat de police suite à ces violences.