Alors que le procès des viols de Mazan touche à sa fin et que résonne plus que jamais la nécessité de croire les victimes, le témoigne de Marie Truchot montre, s'il était nécessaire, qu'il y a encore beaucoup de travail à faire. À 32 ans, cette professeure de yoga et ex-compagne du rappeur Moha La Squale a confié à France Info le calvaire qu'elle endure encore face à ceux qui ne veulent pas reconnaître la parole des victimes de violences et en particulier celle des femmes.
Le 5 juillet, Moha La Squale a été condamné à quatre ans d’emprisonnement, dont un an avec sursis, pour violences conjugales, séquestrations et menaces de mort envers six de ses anciennes compagnes. Marie Truchot est l'une d'entre elles. Dans une interview accordée à France Info, filmée et publiée le 30 novembre, elle raconte comment elle a vécu le procès. "J'ai reçu énormément de menaces de mort, de viol de la part de ses fans sur Instagram qui m'ont retrouvée et qui me harcelaient", raconte-t-elle.
Si l'on imagine que ce déni de la parole des victimes et le cyber-harcèlement subi par Marie Truchot se serait arrêtait une fois le verdict rendu, c'est sans compter sur la ténacité du boysclub. "Il n'y a rien qui les satisfait, dit-elle à propos de ceux qui soutiennent les hommes accusés ou condamnés pour des faits de violences. Même quand il y a eu un procès, même quand il y a eu des preuves, même quand c'est acté, cette personne a été jugée coupable, il y a quand même des gens qui vont dire : "non mais ne la croyez pas, c'est une menteuse c'est sûr"".
Comme le rappelle Marie Truchot, nier la parole des victimes ou les renvoyer à de prétendus mensonges n'est malheureusement pas un comportement propre aux fans de Moha La Squale. "Il y a encore énormément d'hommes en France qui continuent de penser que la victime gagne quelque chose à porter plainte, alors qu'en vérité ça coute énormément d'argent de porter plainte, souligne-t-elle. Il faut payer un avocat, il y a une caution à déposer à la justice pour voir si votre plainte est sérieuse ou pas, en plus de ça psychologiquement c'est très très lourd, c'est vraiment difficile, et surtout à la fin on ne gagne pas d'argent. En France, on n'est pas aux Etats-Unis, on n'a pas des dommages et intérêts de 100.000 euros, on a tout juste de quoi rembourser notre avocat et, éventuellement, s'il y a un petit surplus ce sera pour payé les séances de psy dues aux dommages constatés par le médecin de l'UMJ (unité médico-judiciaire ndlr). On ne gagne rien."
Rappelons aussi qu'en plus du coût financier et psychologique que représente le fait de porter plainte, les victimes subissent souvent un deuxième traumatisme au moment du verdict, car rare sont les hommes accusés de violences à être condamnés. En matière de violences sexuelles, en 2022, le journal le Monde rapportait les chiffres aberrants d'une enquête de l’Insee ("Cadre de vie et sécurité") : seulement 0,6 % des viols ou tentatives de viol auraient donné lieu à une condamnation en 2020.