Nager, c'est se réapproprier son corps et s'émanciper "avec sensualité", défend la philosophe du désir Chantal Thomas
Nager, c'est se réapproprier son corps et s'émanciper "avec sensualité", défend la philosophe du désir Chantal Thomas
La nage permet-elle de se libérer ? Chantal Thomas, brillante philosophe, le rappelle volontiers dans ses écrits, les podcasts où elle intervient, les interviews. Dans les pages de "Madame Figaro", l'érudite dévoile les atours émancipateurs de la mer, l'océan, la baignade.
Qu'est-ce que la nage ? Une source d'émancipation pour les femmes. Une autre manière, profondément sensuelle, d'expérimenter sa relation au corps, à la nudité, aux autres.
C'est en tout cas ce dont est persuadée la philosophe et historienne du libertinage Chantal Thomas. L'autrice de "Souvenirs de la marée basse" et "Journal de nage" est revenue sur cette conviction en ce début d'été, et c'est passionnant.
Dans les pages de "Madame Figaro", l'érudite dévoile les atours émancipateurs de la mer, l'océan, la baignade. "Dans la mer ou l'océan, on se sent porté, exalté, on sent son corps répondre aux sollicitations de l'eau", détaille-t-elle avec émotion.
"J'ai voyagé, nagé partout dans le monde, jusque dans le Grand Lac Salé, aux États-Unis, où l'eau vous porte tellement qu'elle vous enserre et qu'il est presque impossible de bouger".
"Mais chaque fois qu'on peut nager dans une mer ou un océan, il existe quelque chose entre l'appropriation, puisque le paysage devient nôtre, et l'acceptation d'une dépossession de soi. Chaque bain est unique".
On vous le disait volontiers l'espace d'un long article enrichi des témoignages de nos lectrices : la nage libère le corps des femmes, c'est indéniable. "On se contemple, on renoue avec un corps qu'on prend soin d'écouter... en terme de sensualité, la mer est un espace particulier pour les femmes, un espace de liberté pour nos corps et nos désirs", nous expliquait ainsi l'une d'entre elles, Ariane, avec enthousiasme.
"Avec la nage, il y a comme une oisiveté qui permet de s'occuper de son corps, de se "réconcilier" avec lui après l'avoir malmené à la ville... et, qu'il s'agisse de la mer ou d'une rivière, l'on en vient à tendre l'oreille à ses désir, à les cultiver. Alors que sur le sol, c'est presque impossible", observait encore la jeune femme.
"Quand on nage, les questions s'évanouissent. Tout se dissout. Nager est pour moi lié au silence et je ne comprends pas les gens qui conversent tout en nageant", développe à l'unisson la philosophe Chantal Thomas dans les pages de Madame Figaro. "L'eau dans laquelle je nage représente l'ouverture, la nature, et la nature ne se maîtrise pas, dans mon esprit. La performance m'intéresse peu, sauf si elle se double d'un enjeu esthétique, comme dans la danse, par exemple. Ce qui m'intéresse, c'est l'attention aux sensations".