Nos écrans sont devenus nos meilleurs compagnons. A l'issue (on croise les doigts) d'une période aussi solitaire qu'un an ponctué de confinements et de restrictions sanitaires, on a pu en partie tenir grâce au lien social que téléphones et ordinateurs permettent. Ou encore, à la source inépuisable de culture qu'ils procurent. Binge-watching de séries et films en tout genre, conversations groupées enthousiastes et salutaires, sans compter les appels en visio interminables et autant d'heures passées en télétravail : nos journées sont rythmées par un contact en face à face avec ces surfaces. Et les échappatoires sont rares.
Forcément, avec ces modes de vie aux habitudes ultra-technologiques, certaines conséquences se ressentent. L'impression de sortir de plus en plus essoré·e·s de nos semaines, de moins bien dormir, de ne plus réussir à délimiter sa vie pro de sa vie privée. Des yeux qui accusent le coup, aussi. Mal de tête, frustration... la liste est longue. Une confusion et une fatigue inhérentes à l'époque, qui pèsent sur nos épaules et abiment notre santé mentale. Clairement, on veut agir et retrouver un quotidien plus sain et équilibré.
Pour autant, pas question de tomber dans l'extrême inverse. On souhaite ralentir sans éliminer totalement une pratique digitale dont certains aspects nous conviennent, voire nous réjouissent (la preuve avec ces comptes Insta qui font du bien à l'âme en cas de petite déprime). Se débarrasser de réflexes nocifs pour revenir à une relation moins toxique. Alors, comment faire pour soigner ce que les Anglophones appellent "screen exhaustion", ou l'épuisement lié aux écrans ? Réponse.
On le mentionnait, l'un des premiers à trinquer de cette exténuation, c'est notre regard. Pour la bonne raison qu'à force de se concentrer sur des emails, des messages instantanés, des textes ou des images à une courte distance de nos yeux, et ce de manière continue, ceux-ci doivent travailler plus ardemment, décrypte Nadeem Rob, optométriste, au HuffPost UK. Le spécialiste conseille alors deux techniques pour décrocher.
La première, celle intitulée 20/20/20. "Cela signifie qu'après 20 minutes d'utilisation d'un écran, il faut regarder par la fenêtre à une distance de 6 mètres pendant 20 secondes, puis recommencer. Cela permet à nos yeux de se détendre."
Deuxième exercice, le yoga du regard. "Regardez à gauche, maintenez la position et répétez en regardant à droite. Regardez vers le haut, maintenez la position et répétez en regardant vers le bas. Répétez l'opération quatre fois, en fermant les yeux et en vous relaxant entre les deux", conseille le média.
Au-delà de ces astuces, on peut aussi peaufiner l'aménagement de son espace de travail, en s'installant de préférence à côté d'une fenêtre avec une vue dégagée. Un moyen, assure l'expert, de réduire la fatigue oculaire.
Une énième réunion en visio au programme de votre journée ? Stylist invite à jouer la carte de l'honnêteté, en expliquant pourquoi vous n'allumerez pas la caméra cette fois-là. Voire en questionnant la nécessité de l'appel, et en suggérant de le résumer dans un email (qui se lit certes sur l'écran, mais nécessite moins de temps à le fixer).
Quand nos tâches pros sont bouclées en revanche, restent les rendez-vous perso. Si jadis on se retrouvait autour d'un verre, on se contente ces derniers temps d'un Zoom à plusieurs en soirée ou le week-end, couvre-feu oblige. Un date d'un nouveau genre qui nous réconfortait au début, mais tend désormais à aggraver notre cas. Même lorsqu'il s'agit de discuter avec nos potes ou notre famille, les appareils fatiguent. Seulement, la psychologue Doris Dodgen-Magee analyse que dans ces situations-là, le refus semble plus compliqué.
"Je pense qu'il y a un sentiment de solitude ambiant en ce moment. Les gens sont réticents à faire quoi que ce soit qui pourrait déplaire aux autres", avance-t-elle auprès d'Insider. "Nous n'avons pas le langage ou le vocabulaire pour dire : 'Je me sens vraiment submergé. Ce n'est pas le moment de prévoir quelque chose. Je suis consciente que cela peut sembler vraiment minable'. Nous ne sommes tout simplement pas habitués à ce genre de communication nuancée et vulnérable."
Pourtant, exprimer clairement ce que l'on ressent - autant physiquement qu'émotionnellement - reste important, tant cela permet de couper, et par la même occasion, de faire savoir dans quel état on se trouve à celles et ceux pour qui on compte. Dans un post pour Psychology Today, la spécialiste avise alors de troquer l'appli pour le téléphone, ou de tout simplement ne pas s'engager en amont, à l'aide d'un sobre "je ne suis pas sûre d'être disponible, je vous tiens au courant", afin de se laisser l'opportunité de changer d'avis plus tard.
Au-delà des yeux, s'aérer l'esprit demeure essentiel. En présentiel, on s'y attelait en allant discuter à la machine à café avec quelques collègues en quête de distraction. A la maison, c'est plus compliqué, et on se laisse vite happer par des heures de boulot sans décoller de notre chaise.
Alors, ces breaks 2.0 passent par une promenade en milieu de journée, le bol d'air une fois l'ordinateur éteint, ou par changer de chemin quand on revient des courses (on fait ce qu'on peut pour chambouler un quotidien chiant comme la pluie).
Dans certains cas, note toutefois Stylist, une pause peut aussi prendre la forme d'un divertissement numérique. Angela, une journaliste spécialisée dans la technologie, confie à la journaliste du média britannique qu'elle a récemment acheté un Tamagotchi, comme celui qu'elle avait quand elle était plus jeune, pour se déconnecter. "C'est assez relaxant d'avoir un appareil qui a besoin d'aide, dont je peux m'occuper très facilement et qui ne nécessite pas que j'ouvre mon téléphone", décrit-elle.
Une façon de rappeler qu'utilisés différemment, en s'écoutant, en sachant alerter et s'en détacher quand leur présence devient nocive, le digital a aussi du bon. Reste à le redécouvrir.