Pour une fois, notre année cinéma ne sera pas recouverte de blockbusters estampillés Marvel. Les films de super héros ne seront effectivement pas majoritaires en 2024, et la maison aux idées mise sur un étonnant atout pour dévaster le box office mondial : la popularité de Deadpool, (anti)héros irrévérencieux aux blagues postmodernes et potaches, de retour dans un troisième opus de sa licence, Deadpool & Wolverine. Au menu, action époustouflante au ralenti (comme l'énonce Deadpool dans la bande annonce) et ironie constante.
Et en tête d'affiche, deux comédiens bien connus : Ryan Reynolds et Hugh Jackman. Cependant, on pourrait se tromper en les désignant comme les grandes stars de cette superproduction costumée. Et si la véritable étoile de ce projet incongru n'était autre... Qu'Emma Corrin ? Star à plus d'un titre, puisque les fans de la série The Crown pourraient volontiers complimenter l'étendue de son jeu et son don de mimétisme (dans le show Netflix, elle incarne une Lady Di plus vraie que nature).
Mais fameuse, la célébrité l'est tout autant pour ce qu'elle est, et ce qu'elle fait...
Dans Deadpool & Wolverine, Emma Corrin incarne la Némésis de notre duo, Cassandra, impitoyable et machiavélique. Un énième rôle marquant pour cette célébrité qui détonne dans le paysage Hollywoodien, puisque non-binaire. La non-binarité, c'est refuser d'être catégorisé·e comme "homme" ou "femme" au sein de la société, rompre avec la binarité des genres, et contester les stéréotypes et injonctions qui vont avec. Des stars non binaires, employant de fait le pronom personnel "iel" ("they" et "them" dans la langue de Shakespeare) on pourrait en citer quelques autres, comme Elliot Page (Inception, Juno, The Umbrella Academy) ou Bella Ramsey de la série The Last of Us.
L'industrie semble depuis quelques années ouvrir la voie à tout un champ d'expression LGBTQ dont l'évocation auprès du grand public exige pédagogie et sensibilisation. Car les personnes non binaires, comme les personnes queer en général, homosexuelles, bisexuelles, lesbiennes, transgenres, souffrent au mieux d'incompréhension, au pire de stigmatisation, de mépris et de violences haineuses et discriminatoires. C'est aussi pour cela qu'une star comme Emma Corrin participe à éveiller les consciences de par sa grandissante notoriété.
Et le choix de l'investir dans une production aussi globale qu'un blockbuster Marvel est salutaire. N'en déplaisent à toute une frange, la plus réactionnaire, du public américain. En outre, ce qui dénote, c'est l'intention artistique d'Emma Corrin. L'interprète l'énonce dans la presse, comme le relève Entertainment Weekly : ses inspirations pour le rôle de Cassandra sont plutôt très étonnantes. Une fois le projet accepté, Emma Corrin a demandé aux producteurs quelle devait être la teneur de sa préparation physique. Réponse ? Aucune n'était exigée ! C'est alors du côté de la psychologie et du pur jeu d'acteurice que l'artiste a tout misé.
Et si Emma Corrin a donc mis de côté le programme de remise en forme exigé auprès de bien des stars s'attelant au cinéma d'action (on lui a même refusé un coach personnel !) c'est pour mieux se concentrer sur sa performance, en se replongeant dans certains modèles comme... Le Christoph Waltz de Inglourious Basterds !
Néoclassique de Quentin Tarantino au sein duquel l'acteur germanique incarne pour rappel l'abominable Hans Landa, officier nazi. "C'est une source d’inspiration clé pour mon rôle. Car Hans Landa est d'une politesse désarmante, gentil et indifférent, et c'est ça qui est vraiment effrayant chez lui. Il d'autant plus sinistre qu'il n'a rien à faire pour l'être. Or concernant Deadpool et Wolverine, nous souhaitions justement que ce personnage méchant ne soit pas un méchant dans le sens où on s'attend à ce qu'il le soit", décrypte Emma Corrin.
Une note d'intention qui promet une passionnante partition. Susceptible de voler la vedette au binôme-titre ? On veut bien le croire !