"Ce n'est pas juste une affaire à la #MeToo. C'est constitutionnel". Cette punchline, nous la devons à Betsy Fischer Martin, la directrice exécutive du Women and Politics Institute de l'American University. Comme beaucoup de voix féminines aux Etats-Unis, Betty Fischer Martin souhaite qu'une procédure de destitution soit lancée à l'encontre du président Donald Trump. Pour elle, il n'est pas juste question de réagir aux actes et aux propos d'un misogyne qui, encore récemment, a fait l'objet de 43 nouvelles allégations d'agression et d'harcèlement sexuels. Non, "cela a à voir avec la sécurité nationale et la politique étrangère", dit-elle au site CS Monitor.
A l'approche de 2020, d'aucuns saluent cette initiative. Jusqu'aux plus hauts rangs. Il faut dire que Donald Trump traîne derrière lui bien des casseroles. L'enquête en destitution ouverte par les élus démocrates de la Chambre des représentants pourrait définitivement mettre sa présidence en péril : largement appuyée par des témoignages, elle révèle que le président des Etats-Unis aurait demandé au dirigeant ukrainien des informations à propos de son rival démocrate Joe Biden, en vue de la future course à la présidentielle. Un cas flagrant d'abus de pouvoir, d'entrave à la justice et de corruption.
C'est d'ailleurs ce sur quoi ont insisté, le 4 décembre dernier, trois professeurs de droit, lors d'une audition tenue au Congrès : à les écouter, la procédure de destitution de Trump est une question de respect de la démocratie, explique le site Reuters. Et tout ce qui confond le président exige indéniablement sa mise en accusation, c'est-à-dire son "impeachment". Un mot qui hante la présidence Trump. Or, nombreuses sont les femmes à le clamer, depuis bien longtemps déjà...
On pense évidemment à l'ex-conseillère à la Maison Blanche Fiona Hill, qui, le 21 novembre dernier, témoignait justement au Congrès, accusant la Russie et son ancien "boss" de propager des "fake news" à propos de cette enquête des plus compromettantes. Notamment en prétextant une soit-disant ingérence de l'Ukraine, et non de la Russie, au sein des dernières élections présidentielles.
Impossible d'ignorer également la sénatrice de Californie Kamala Harris, qui, après avoir été envisagée comme l'une des favorites de la primaire démocrate, a finalement lâché la course le 3 décembre. Face aux moqueries viles de Trump, décochées (comme toujours) sur Twitter, Kamala Harris a rétorqué par un fabuleux "mic drop" : "Ne vous en faites pas, on se reverra à votre procès", a-t-elle écrit sur Twitter.
Un procès qu'elle n'est pas la seule à souhaiter. Il faut dire que depuis le début, les femmes n'ont cessé de protester contre Donald Trump. Dès le lendemain de l'investiture du milliardaire, le 21 janvier 2017, elles étaient des milliers à manifester dans les rues de Washington, lors de la Women's March, se révoltant contre cette victoire tout en défendant les droits des femmes, des bonnets de "chattes" roses posés sur la tête. Belle référence au tristement fameux "il faut attraper les femmes par la chatte" de l'ex-vedette de télé-réalité. Et le combat n'a jamais cessé.
Aujourd'hui, les voix des femmes résonnent aux plus hauts sommets. Et exigent toutes la justice et la vérité. C'est évidemment le cas de la cheffe démocrate du Congrès américain, Nancy Pelosi. C'est elle qui, dès le 24 septembre dernier, a lancé cette procédure de destitution à l'encontre de Trump tout en exigeant la mise en place d'une enquête d'envergure. Une décision qu'a d'ailleurs immédiatement salué la sénatrice Elizabeth Warren. Pour la candidate démocrate, que certains imaginent déjà en première présidente de l'Histoire des Etats-Unis, cela fait trop longtemps que Donald Trump se croit "au-dessus des lois". Et il est temps que cela cesse.
Un avis avec lequel s'accordent désormais anciennes fonctionnaires et actuelles législatrices. Ainsi, parmi les comparutions qui ont lieu ces dernières semaines au sein du Congrès, les noms féminins sont loin d'être rares, rappelle The Guardian. Ce sont des femmes puissantes et influentes, à l'expertise indiscutable, qui viennent témoigner. Comme la conseillère spéciale du vice-président Mike Pence, Jennifer Williams. Fiona Hill, qui autrefois s'occupait de l'ex-URSS, de la Russie et de l'Europe au sein du Conseil de sécurité nationale. Mais aussi l'ancienne ambassadrice des États-Unis en Ukraine, Marie Yovanovitch. Sans oublier la sous-secrétaire adjointe à la Défense pour les affaires russes et ukrainiennes Laura Cooper. Des voix qui comptent.
Pour The Guardian, celles qui sont venues apporter leurs témoignages ces deux dernières semaines ont été applaudies et saluées "pour leur compétence et leur sang-froid, à un moment extraordinaire de l'Histoire américaine". Selon Jenna Ben-Yehuda, présidente de l'organisation de développement national Truman National Security Project, c'est même "un moment de grande fierté pour les femmes". Des prémisses de l'investigation à aujourd'hui, la procédure d'impeachment, si elle a lieu, ne pourra être évoquée sans mentionner cette phénoménale "féminisation". "Ce n'est pas quelque chose que nous avons vu auparavant", insiste la professeure Jennifer Lawless de l'Université de Virginie. Historique.
Selon Vox, ce désir de destitution n'est pas sans lendemain mais entraînera une mobilisation politique accrue des femmes en 2020, qu'elles soient démocrates ou républicaines. On veut bien le croire. Et l'opposition à Trump ne se limite pas aux discours prononcés durant les auditions. Car si parmi les citoyens américains 43 % demeurent opposés à l'idée d'un processus de destitution, 61 % des femmes lui sont favorables, nous apprend un récent sondage de CNN. Par contre, à peine 40 % des hommes sondés sont sur la même longueur d'ondes. Cela s'explique en partie par le fait que "les femmes sont plus susceptibles d'être démocrates que les hommes", précise Vox.
Un autre sondage d'opinion effectué sur plus de mille citoyens américains et mis en ligne sur Business Insider précise encore que 52 % des femmes interrogées souhaitent que le président Trump soit destitué de ses fonctions. Le site souligne que les femmes, et en particulier les femmes de couleur, désapprouvent beaucoup plus la présidence de Donald Trump que les hommes. Preuve en est que le politicien divise les sexes.