Le monde de la mode est en train d'opérer une mutation importante. En effet, de nombreuses marques commencent, petit à petit, à dévoiler des campagnes publicitaires non retouchées en exposant librement des bourrelets, de la cellulite ou des vergetures.
En septembre, les femmes noires font la Une des magazines américains et britanniques, notamment chez Vogue, Elle, Glamour ou encore Marie Claire.
Chez Teen Vogue, c'est une autre forme de diversité qui est mise à l'honneur. Pour son numéro du mois de septembre, le magazine américain affiche trois couvertures différentes, intitulées "The new faces of fashion", ou littéralement "Les nouveaux visages de la mode".
Sur chacune d'entre elles, Jillian Mercado, Chelsea Werner et Mama Cax, posent sur un fond coloré. Ces trois mannequins sont toutes atteintes d'un handicap.
Le magazine leur donne d'ailleurs la parole dans un article intitulé "A quoi ça ressemble d'être un mannequin handicapé dans l'industrie de la mode ?", dans lequel les trois jeunes femmes s'expliquent sur leur métier et leur quotidien.
La volonté de Teen Vogue ? Faire évoluer les mentalités autour de l'image des mannequins : "Le mannequinat s'est historiquement appuyé sur un ensemble rigide d'idéaux de la beauté : mince, valide, blanche et grande. Nos vedettes de septembre sont à l'avant-garde d'un changement dont l'industrie a besoin."
Chelsea Werner est une gymnaste et une mannequin, atteinte de trisomie 21. Mama Cax est modèle, blogueuse et porte-parole pour les personnes handicapées, étant elle-même amputée d'une jambe. Jillian Mercado, elle, est touchée par une dystrophie musculaire. Ensemble, elles changent l'image des mannequins valides qui défilent sur les podiums et ouvrent ainsi le débat sur la place du handicap dans le monde de la mode.
Pourtant, le chemin est encore long. Lisa, la mère de Chelsea Werner, explique avoir été rejetée lorsqu'elle a commencé à chercher des agences de mannequins pour sa fille. "Nous avons contacté toutes sortes d'agences à San Francisco et à Los Angeles et chacune d'entre elles nous ont dit qu'il n'y avait pas de marché disponible pour une mannequin handicapée".
Pour Mama Cax, le blogging a été un moyen d'inspirer d'autres femmes handicapées. Sur son compte Instagram, suivi par plus de 162 followers, elle pose avec (ou sans) sa prothèse, qu'elle montre fièrement et qu'elle assortit en fonction de ses tenues ou de ses envies. "Quand j'ai commencé à bloguer, beaucoup de femmes amputées me disaient qu'elles n'avaient jamais vu quelqu'un d'amputé, montrer sa prothèse sur les médias sociaux ou ailleurs", confie-t-elle.
Au final, ce manque de représentation peut avoir des conséquences, notamment sur la santé mentale ou la confiance en soi. Pour Jillian Mercado, c'est ce manque de diversité qui l'a exclue : "Il n'y avait personne qui me ressemblait dans les magazines ou dans les médias grand public, à la télévision, ou quoi que ce soit d'autre. Cela m'a exclue de quelque chose qui me passionnait beaucoup. C'était vraiment déroutant parce que je connaissais ma valeur dans le monde. Je savais qu'il y avait des gens comme moi, mais nous ne sommes jamais inclu.e.s dans les conversations", explique-t-elle au site Teen Vogue.
"Même quand j'étais plus jeune, j'ai toujours su qu'il y avait un trou dans l'industrie de la mode et que ce n'était pas juste que je ne me sente pas représentée. Je voulais juste sentir que j'en faisais partie, mais rien ne m'aidait à voir ça", ajoute-t-elle.
Heureusement, les choses commencent peu à peu à évoluer. "Cela va prendre du temps et de la patience, mais je suis une combattante et une guerrière, je continuerai jusqu'à ce que nous soyons tous représentés", affirme Jillian Mercado.
Aujourd'hui, la jeune femme raconte son quotidien sur son compte Instagram, suivi par plus de 103 000 personnes. Campagnes publicitaires, shootings photos ou cours de boxe, elle vient d'ailleurs d'assister à un défilé de la Fashion Week de New York. La mannequin a signé chez IMG Models, une grande agence américaine. Elle a notamment posé pour Nordstrom, Target, Diesel et Olay, ce qui lui a d'ailleurs valu un grand panneau publicitaire à Times Square.
Dernièrement, c'est Aaron Philip, une adolescente trans en fauteuil roulant, qui vient de signer avec l'agence internationale Elite. Après avoir posé pour H&M et Asos, la jeune femme de 17 ans voit sa carrière exploser. Des nouvelles qui font du bien et qui insufflent un vent rafraîchissant et salutaire sur le monde de la mode trop normé jusqu'à présent.