"Je suis enfermée toute la journée. C'est pas une vie, à 97 ans..."? Ces paroles bouleversantes sont celles de Jeanne Pault, bientôt 97 ans, résidente d'un établissement de Saint-Gemmes-sur-Loire, dans le Maine-et-Loir. Le 20 avril, elle livrait aux caméras de France 2 son quotidien dans sa maison de retraite. On la voyait sur son fauteuil roulant, seule dans sa chambre, en pleurs. Une séquence qui témoigne de la détresse et de la solitude auxquelles sont condamnées les personnes âgées isolées dans les Ehpad, en pleine épidémie.
Car pendant plusieurs semaines, et ce dès le 11 mars, soit six jours avant le confinement, les visites étaient interdites pour éviter la propagation du Covid-19 auprès des aîné·e·s, personnes les plus touchées par le coronavirus. Et les interactions entre patient·e·s ne faisaient pas exception. "Je ne peux même pas aller chez ma voisine. Ma voisine n'a pas le virus, et puis moi non plus. On pourrait se voir de temps en temps", déplore-t-elle, entre colère et tristesse. "On ne peut même pas discuter".
Elle s'arrête pour essuyer ses larmes, puis explique avoir perdu l'envie de manger. Pourtant, elle se force, "parce que mes enfants rouspètent. Ils me disent 'Maman, tiens le coup jusqu'au bout'". Cela fait plus d'un mois que ses enfants et son mari n'ont pas pu venir la voir "Mes enfants venaient tous les jours", lance-t-elle. "C'était un énorme pilier pour elle", ajoute une soignante.
Un déchirement pour toute la famille, qui va cependant bientôt pouvoir être réunie. Dimanche 19 avril, Olivier Véran, le ministre des Solidarités et de la Santé, a annoncé que les visites reprendraient de manière très encadrée dans les établissements qui accueillent nos ancien·ne·s. Sur les réseaux sociaux, l'émotion est palpable. Certains internautes questionnent d'ailleurs la gestion du confinement des résident·e·s par le gouvernement : "Que l'on ne me dise pas qu'il n'était pas possible de trouver des aménagements pour qu'ils puissent garder un contact avec ceux qu'ils aiment et qui les aiment", avance en ce sens une utilisatrice. A Saint-Gemmes-sur-Loire, les soignant·e·s se sont mobilisées pour faire pression sur la direction, et rouvrir aux membres de la famille rapidement.
Le président de la République Emmanuel Macron lui-même a d'ailleurs réagi à la vidéo de Jeanne Pault, soulignant que "pour vous, pour tous nos aînés en maison de retraite ou en établissement, les visites des proches sont désormais autorisées."
En attendant, il existe des alternatives pour combler ce sentiment d'abandon terrible. L'association 1 lettre 1 sourire propose par exemple d'écrire une lettre à une personne âgée, confinée dans une maison de retraite. Une façon de contribuer à faire perdurer un lien social, aussi essentiel à la santé mentale que physique de nos aîné·e·s.