C'est à se demander si Graeme Whiting n'est pas un disciple de Lord Voldemort, tant son aversion pour Harry Potter est grande. Ce proviseur britannique à la tête de l'école privée The Acorn School, a récemment publié sur le site web de l'établissement une longue critique envers les livres de J.K. Rowling et la littérature fantasy en général. Car selon lui, ces ouvrages qui plaisent tant aux jeunes enfants sont tout simplement dangereux et peuvent même "endommager leurs capacités cérébrales". Mais alors, quel est le problème ? Selon lui, le marketing actuel mise sur du sensationnalisme, des couvertures de livres colorées et attirantes mais qui cachent parfois des textes "démoniaques, inacceptables et qui influencent" les enfants.
Il ajoute que cette littérature "obscure et démoniaque dont les idées sont soigneusement cachées avec des histoires de magie, de pouvoir et de fantômes, va pousser les enfants à rechercher des textes toujours plus sensationnels". Bien évidemment, l'homme ne s'arrête pas là et compare ces livres à de la "nourriture avec des tonnes de sucres ajoutés" et supplie presque les parents d'adopter "une attitude protective" vis-à-vis de leur progéniture. La prochaine convention Harry Potter, c'est niet donc.
C'est donc une vraie chasse aux sorcières que vient de lancer Graeme Whiting sur le site Internet de l'école qu'il dirige. Sur le banc des accusés, Harry, Ron et Hermione côtoient Le Seigneur des Anneaux, Game of Thrones, Hunger Games, l'oeuvre de Terry Pratchett et bien d'autres "ouvrages considérés comme des must-have, mais qui contiennent des textes addictifs et insensibles qui encouragent des comportements difficiles chez les enfants, que l'on peut ajouter aux statistiques concernant les jeunes malades mentaux". Le proviseur conseillerait de jeter tous ces livres au bûcher et d'en faire un grand feu de joie que ça ne nous surprendrait même pas.
Bien évidemment, pour éviter de tomber entre les griffes diaboliques de la pernicieuse Katniss Everdeen et de ses petits copains, c'est bien sûr vers "les valeurs d'antan, la littérature traditionnelle et la poésie classique" qu'il faudrait se tourner. Graeme Whiting conseille aux parents d'offrir à leurs chères têtes blondes des ouvrages de William Wordsworth, John Keats, Charles Dickens, Percy Shelley et bien sûr, William Shakespeare.
Mais cette littérature classique convient-elle vraiment aux petits lecteurs ? Dans une tribune publiée sur le site du Guardian, l'auteure de romans Young Adult, Samantha Shannon, rappelle ainsi que certaines pièces de Shakespeare sont très violentes "Dans Titus Andronicus, l'une de ses premières pièces, il met en scène le viol de Lavinia, la fille de Titus, de manière très brutale. Pour s'assure qu'elle ne donnera pas le nom de ses violeurs, ses bourreaux lui coupent les mains et la langue". On pourrait continuer en rappelant que dans Othello, le héros, fou de jalousie, tue son épouse en l'étouffant. Encore plus violente, la tragédie Macbeth ajoute en plus des éléments fantastiques à l'intrigue puisque le futur roi d'Ecosse croise sur sa route des sorcières. Quant aux poètes listés, s'ils sont à l'origine de sublimes morceaux de poésie, leurs textes peuvent difficilement être compris par des enfants.
Cela va sans dire, affirmer sans aucun fondement qu'un livre peut endommager les capacités cérébrales des enfants est inconscient et dangereux. Mais ce qui est peut être encore plus choquant, c'est qu'un homme censé veiller sur l'éducation d'écoliers tienne un discours aussi réactionnaire, presque dictatorial. On en viendrait presque à croire que Graeme Whiting sort tout droit d'un univers dystopique et qu'il n'y tenait pas forcément le rôle du héros...