Le milieu du cinéma se questionne enfin sur les violences commises dans son enceinte. Le 22 octobre dernier s'est constitué la commission d'enquête sur les violences sexistes et sexuelles commises dans le cinéma, l'audiovisuel, le spectacle vivant, la mode et la publicité. Le 18 décembre, deux actrices françaises étaient auditionnées. Anna Mouglalis, et Nina Meurisse. Cette dernière, que l'on a récemment vu dans le film L’Histoire de Souleymane, a alors témoigné d'un tournage traumatisant alors qu'elle n'était que mineure.
Son passage face à la commission a été filmé et repartagé par la chaîne LCP le jour même.
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Sans citer les personnes concernées, Nina Meurisse raconte avoir vécu son premier tournage à l'âge de 10 ans. "Dans ce film il y a une scène de viol. Je demande qui va jouer cet homme et on me dit que la réalisatrice ne veut pas que je le rencontre avant. Je comprends pas pourquoi mais apparemment ce sera mieux pour la scène", relate-t-elle. "On m'explique que je dois marcher, qu'il me collera contre l'arbre, ça va être très simple."
Alors que le moteur se met à tourner, la scène va traumatiser l'actrice : "Je vois arriver en courant un jeune acteur qui me saute dessus, qui me prend la poitrine, et essaie de me soulever la robe. On refera cette scène plusieurs fois. J'ai 10 ans, je n'ai même jamais embrassé un garçon, je suis tétanisée."
Pour simple soutien psychologique, elle explique qu'une jeune fille s'occupant d'elle pendant le tournage l'emmène voir "les poussins qui sont nés dans la ferme d'à côté". "Et du haut de mes 10 ans, je sais déjà qu'il y a quelque chose qui cloche. Je me souviens comme si c'était hier me dire : mais tu crois que tu vas me faire oublier ça avec des poussins ?", a-t-elle dit, encore sous le choc.
Qui protège les enfants dans le cinéma ? Dans le cas de Nina Meurisse, il semblerait que peu d'adultes se soient interposées entre elle et les demandes de la réalisatrice. Pour preuve, Nina Meurisse décrit une autre scène du tournage de l'époque.
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"Un peu plus tard dans ce tournage, une scène de flagellation. La scène se passe dans une marre la nuit, j'ai toujours dix ans. Il fait nuit noir, on me donne un bâton, on me dit de m'installer dans la marre et de me frapper le dos avec. Je le fais, sans grande force au début ce qui agace la réalisatrice qui me crie dessus de le faire plus fort, plus fort, plus fort. Et plus ma rage contre elle monte et plus je me frappe avec une violence inouïe. En fait, je la frappe elle."
Après de nombreuses prises, l'équipe qui tourne aurait coupé la caméra et dit : "si on la refait encore une fois on arrête là le tournage".
Et l'actrice de conclure, comme si elle y était encore : "La scène s'arrête mais l'horreur est en moi et je me dis qu'ils auraient dû arrêter plus tôt." La violence a-t-elle été abordé par l'équipe, à l'époque ? "ça restera un non-sujet tout au long du tournage, il n'y aura pas d'excuses, c'était une scène comme les autres", regrette-t-elle face à la commission.