Même si longtemps, au mieux vous ne vous sentiez pas concernée, au pire vous vocifériez en silence en attendant votre métro les jours noirs, la donne a changé. La crise a envahi notre quotidien et les manifestations se font plus fréquentes. Pour ou contre, là n’est pas la question, l’important est de comprendre les règles du jeu.
Le droit de grève est un droit fondamental de tout travailleur. Le 25 Mai 1864, la loi Ollivier reconnaît ce droit mais avec des restrictions. Il est pleinement consacré à la Libération et inscrit dans la constitution du 27 octobre 1946.
Aujourd’hui, pour être licite, une grève est soumise à certaines conditions. (source cadresonline)
• il faut une cessation totale du travail : autrement dit, un ralentissement d’activité ou une exécution inhabituelle du travail ou encore le non-respect d’une obligation particulière du contrat de travail ne constituent pas une cessation totale d’activité mais une exécution fautive du contrat de travail qui peut être sanctionnée par l’employeur.
• une cessation collective du travail : le droit de grève doit être exercé collectivement. Toutefois, il n’est pas nécessaire que la majorité des salariés se mettent en cessation de travail pour que le mouvement soit qualifié de grève.
• une cessation concertée : une concertation préalable des salariés doit avoir lieu mais la grève spontanée des salariés dès lors qu’elle correspond à une décision commune est licite.
• des revendications professionnelles : la cessation totale du travail par les salariés doit avoir pour objectif d’appuyer des revendications professionnelles pour être qualifiée de grève.
• il est nécessaire que l’employeur ait été informé des revendications salariales (salaire, conditions de travail, exercice du droit syndical, défense de l’emploi...) au moment de l’arrêt de travail.
C’est l’expression qu’on entend partout mais dont on ne connaît ni les tenants, ni les aboutissants. Il désigne l'obligation faite aux salariés et entreprises, en particulier de services publics d'assurer un service minimum, en toute circonstance, en particulier en temps de grève et pendant les périodes de pointe.
Cheval de bataille de la campagne présidentielle, la loi sur le service minimum dans les transports a été adoptée par le parlement dès août 2007. Elle instaure l’obligation pour les salariés d’indiquer quarante-huit heures à l’avance leur intention de faire grève, pour permettre aux collectivités locales de s’organiser. Le service minimum d’accueil dans les écoles primaires a quant à lui été mis en place à la rentrée 2007. Une loi de juillet 2008 impose la mise en place d'un service d'accueil dès lors qu'il y a plus de 25% d'enseignants en grève dans l'école. Les grévistes doivent également se déclarer quarante-huit heures à l'avance.
Pas facile de s’y retrouver entre tous les mouvements syndicaux. Il en existe plusieurs sortes en France : les syndicats professionnels, étudiants et lycéens... Le taux de syndicalisation est faible dans notre pays, inférieur à 10 %. Même s’il y a souvent des polémiques, on estime que leur rôle est loin d’être négligeable.
Parmi les syndicats professionnels, on distingue des groupements patronaux (le Medef) des groupements de salariés. Cinq organisations de travailleurs ont été reconnues représentatives en France.
Pour éviter les gaffes du type « je soutiens FO, Chérèque est un homme bien », suivez le petit kit du « Qui est qui ? »:
- La CFDT (Confédération française démocratique du travail ) est la première organisation syndicale de salariés par son nombre d’adhérent (plus de 800 000). Elle est dirigée François Chérèque depuis 2002.
- La CGT (Confédération générale du travail) est à l’origine la Fédération des Cheminots. C’est elle qui a obtenu le plus de suffrages (33,9%) aux dernières élections prud'homales, le « baromètre » de l’influence des syndicats en France malgré une participation toujours des plus faibles. Son actuel secrétaire général est Bernard Thibault.
- FO (Force Ouvrière ) est la troisième confédération syndicaliste en importance, derrière la CGT et la CFDT avec à sa tête Jean-Claude Mailly.
Massives, vaines, historiques ou mémorables, certaines grèves ont marqué nos esprits.
- Novembre /décembre 95 : Devant le soutien de l'opinion publique à un mouvement qui rassemble plus d'un million de manifestants, le plan Juppé sur les régimes spéciaux de retraite a été retiré.
- Mars 2005 : Plus de 500 000 personnes descendent dans la rue le 10 mars 2005 pour dénoncer la baisse du pouvoir d'achat, la précarité, mais aussi pour soutenir les 35 heures.
- Mars 2006 : C’est les manifestations contre le CPE qui ont vu émerger des personnalités comme Bruno Julliard ou encore Julie Coudry. Entre 1 et 3 millions de personnes ont défilé contre le projet de CPE. Recul historique du gouvernement.
- Nov. / Déc. 2007 : On se souvient bien du mouvement de l’automne 2007 contre la réforme des régimes spéciaux. La mobilisation a commencé le 18 octobre : un premier jour de grève très suivi, avec un chiffre de participation quasi-historique de 73,5% de cheminots en grève. Le mouvement n'a pris fin que le 24 novembre, après dix jours de mobilisation qui ont constitué la plus longue grève depuis 1995 dans les transports.
Les salariés grévistes ne peuvent prétendre au paiement de leur salaire pour les périodes de grève. Le salaire étant la contrepartie de la prestation de travail que vous effectuez pour le compte de votre employeur. En conséquence, si vous ne vous présentez pas à votre poste de travail, votre employeur n'est pas tenu de vous rémunérer. Il ne s’agit en aucun cas d’une sanction pécuniaire, qui est prohibée par la loi, mais simplement de la conséquence de l’inexécution de l’obligation du salarié de fournir un travail.
Chaque jour de grève conduit donc logiquement à une perte de salaire proportionnée à la durée de votre absence. Toute mesure discriminatoire en matière de rémunération et d’avantages sociaux est prohibée.
Dans les faits, certaines techniques permettent de contourner les lois :
- Prise de jours de congés et RTT : le premier réflexe des salariés sera sans doute de poser des jours de congés ou de RTT.
- Récupérer : autre solution classique qui consiste à rattraper après le conflit les jours où le salarié n’a pu venir travailler. Aucune absence ne sera comptabilisée, ni aucune retenue pratiquée sur son salaire.
- Négocier : les négociations de fin de grève ou de reprise du travail se terminent presque toujours par le "traitement" des jours de grève" et le paiement partiel ou total de ces jours.
En espérant que cet éclaircissement sur les grèves, même s’il est loin d’être exhaustif vous donnera quelques clés pour mieux comprendre les enjeux actuels.
On vous recommande également le dossier de Rue 89 sur ce que manifestants et forces de l'ordre ont le droit de faire (ou pas) les jours de grève.