Se laver minutieusement les mains après chaque rendez-vous avec un patient est devenu un rituel obligatoire pour les médecins. Pourtant, une étude récemment publiée dans la revue Mayo Clinic Proceedings révèle qu'avoir les mains propres n'est pas suffisant pour enrayer toute contamination dans un cabinet médical. En cause ? Le stéthoscope du médecin, qui lui, est rarement nettoyé et est porteur de dizaines de milliers de germes et microbes issus de douzaines de patients examinés.
« Les médecins se lavent les mains avec des solutions éthyliques ou du savon à de nombreuses reprises dans la journée, mais ils replacent directement leur stéthoscope à l'intérieur de leur poche, sans traitement », explique à USA Today Didier Pittet, auteur de l'étude et chef du service de prévention des infections aux Hôpitaux universitaires de Genève. « Alors que les docteurs se nettoient les mains après chaque examen, ce n'est pas le cas de leur stéthoscope. Ils appliquent ensuite le stéthoscope sur un second patient, puis un troisième, transportant les bactéries d'un patient à l'autre. »
Le médecin, associé au développement de la stratégie de lutte contre les maladies nosocomiales de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a cherché à objectiver la colonisation des stéthoscopes par les germes. Pour cela, 83 patients ont été examinés par un médecin équipé de gants et d'un stéthoscope stérile. Les chercheurs ont par la suite procédé à une mesure du niveau de bactéries sur le diaphragme du stéthoscope (la partie en contact avec le corps du patient), ainsi que son tube. Ils ont aussi mesuré le niveau de bactéries sur quatre zones des mains du docteur.
Le résultat est édifiant : sur les mains du médecin, comme sur son stéthoscope, les chercheurs ont constaté la présence d'un grand nombre de bactéries, notamment la Methicillin Resistant Staphylococcus Aureus (MRSA), résistante aux antibiotiques. Surtout, il s'avère que pour 71 patients, la concentration de bactéries sur le stéthoscope était bien plus élevée que sur n'importe quelle partie des mains du docteur, à l'exception du bout de ses doigts.
Une solution, désinfecter régulièrement son stéthoscope
Pour Didier Pittet, le stéthoscope ne peut pas être mis en cause dans la propagation des infections. En revanche, les résultats de l'étude prouvent qu'il joue très certainement un rôle dans la transmission des bactéries, ces dernières pouvant y rester vivantes de quelques heures à un ou deux jours.
Reste donc une solution pour les médecins : continuer à se laver les mains à l'accueil d'un nouveau patient, et pratiquer un nettoyage très régulier de son stéthoscope, faute de stéthoscope individuel. « Il faut souligner que pour les patients les plus à risque, les hôpitaux fournissent déjà des stéthoscopes individuels, explique Didier Pittet, mais cela semble inenvisageable pour l'ensemble d'un établissement de soins. » « Il est clair que laver ses mains avec un solution éthylique est le plus important pour éviter la contamination. Mais si vos mains sont propres et pas votre stéthoscope, c'est contre-productif. » Il se montre toutefois confiant : « Il y a quinze ans seuls 20 % des soignants se lavaient les mains systématiquement, on voit donc que les mentalités peuvent changer, et si des recommandations sont édictées en ce sens les stéthoscopes ne devraient bientôt plus poser de problème. »
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