On connaissait déjà le manspreading, cette tendance qu’ont les hommes à écarter fortement les jambes dans les transports en commun au risque de prendre toute la place. Un problème pris avec beaucoup de sérieux aux Etats-Unis, si bien que le métro new-yorkais a déployé une campagne d’affichage pour demander à ces messieurs de bien vouloir serrer les cuisses. Il n’en fallait pas beaucoup plus pour que naisse une nouvelle théorie : le manslamming. C’est à la féministe Beth Breslaw que l’on doit l’invention de ce nouveau terme. En effet, selon elle, les hommes prendraient trop de place sur le trottoir au détriment des femmes. Dans une interview accordée au New York Magazine, elle raconte alors avoir mené l’expérience suivante : pendant deux mois, elle a marché comme un homme – soit en s’appropriant l’espace public.
Résultat ? En décidant de s’accaparer le trottoir, Beth Breslaw a apparemment fait face à des vagues entières d’hommes bousculeurs. « Je me souviens de chaque homme qui m’a cédé le passage, parce qu’ils étaient tellement peu nombreux », raconte-t-elle au New York Magazine. Selon elle, les femmes aussi peuvent bousculer, mais généralement, « elles ont une réaction audible quand elles s’en rendent compte ». Mais peut-on concrètement parler d’un marquage de territoire ? Le manslamming existe-t-il vraiment ?
Car avant de s’attaquer à un problème de genre, n’y a-t-il pas d’autres données à prendre en compte ? On peut ainsi commencer par dire qu’une ville comme New York est surpeuplée et que naviguer dans les rues n’est pas toujours chose aisée. Hommes comme femmes sont de plus en plus isolés par leurs téléphones/casques, et l’on peut ajouter à cela le stress d’être en retard, ou tout simplement le fait d’être mal élevé. Qui plus est, l’expérience de Beth Breslaw ne serait-elle pas biaisée ? Car la jeune femme a eu cette idée suite à une discussion avec une amie travaillant dans le quartier très masculin de la City et qui se plaignait d’être bousculée en permanence. On pourrait donc en déduire que Beth Breslaw a commencé son expérimentation en visant presque exclusivement les passants masculins.
Voulant savoir si le manslamming était un vrai problème de société, la journaliste américaine Katherine Timpf a tenté la même expérience dans un quartier bondé pendant une heure entière. Résultat : 66 femmes lui sont rentrées dedans contre 23 hommes. Doit-on parler de womanslamming pour autant ? « Non », assure la journaliste. « Cela prouve seulement que ce n’est pas un phénomène de genre. Si vous marchez dans la rue sans faire attention aux autres, vous allez forcément les bousculer. C’est aussi simple que ça ». Nous vivons dans une société patriarcale, mais le sexisme n’est pas la réponse à chacun de nos maux. Entre féminisme et misandrie, il n’y a qu’un pas à franchir, et celui-ci est loin d’aider la cause de la femme.