"C'est Clitorine !!"
Ca, c'est l'exclamation qu'on a pu lire partout sur les réseaux sociaux à l'occasion de ces mouvementés jours de compétitions sportives qui sont venus bousculer Paris. Ce doux nom, c'est celui que les internautes ont décidé d'attribuer à un drôle de personnage que vous n'avez pas pu louper : la mascotte des Jeux Olympiques 2024.
Son vrai blaze, c'est Phryge.
Logique : cette mascotte est un bonnet phrygien muni de baskets. Mais depuis sa présentation au grand public le 14 novembre 2022 (oui, le temps file) nombreux et nombreuses furent ceux à celles à y voir bien autre chose... Un clitoris sur pattes ! D'où le sobriquet de Clitorine... Et la blague a traversé l'Atlantique. On retrouve les mêmes analogies dans les pays se contentant d'admirer la capitale.
Au Brésil, Phryge a été rebaptisée Clitorito.
Ou quand le grand symbole des révolutionnaires français de 1789 devient un tout autre emblème, celui des luttes féministes actuelles... Tout en se targuant d'être le plus populaire des memes hexagonaux actuels. Car sur Twitter notamment, Phryge est devenue hyper virale.
On s'amuse volontiers de cette analogie, mais elle n'est pas si légère !
Depuis des années, notamment sur Instagram à travers des comptes de sensibilisation et de santé, des militantes et influenceuses féministes s'engagent pour une meilleure visibilité du "clito" et par-là même du bien être intime des femmes, invitées à prendre davantage conscience de leur corps, et invitant leurs partenaires à faire de même. Car c'est aussi par-là que s'exprime l'égalité des genres.
"Paris est la capitale de l’amour et l’organe du plaisir féminin ne peut pas être mis sur le carreau", observe-t-on d'ailleurs dans 20 Minutes. A juste titre. Que "Clitorine" ou "Clitorito" (vous constaterez que la France préfère féminiser cette chère mascotte) soit le symbole de la France - à l'instar d'Edith Piaf, Aya Nakamura, le groupe Air et Philippe Katerine - à l'occasion de la plus grande des compétitions sportives internationales n'est donc pas anodin.
"Fallait bien que la France montre aux hommes du monde entier à quoi ça ressemble (et où ça se trouve)", s'amusait-on déjà en novembre 2022 sur Twitter.
Un symbole bien malgré elle donc, mais peu importe : parler du clito n'a rien de dérisoire. Daphné Leblond, co autrice du documentaire "Mon nom est clitoris", expliquait à ce sujet pour Terrafemina : "Le plaisir clitoridien est tellement ignoré et on ne lui accorde pas assez de place !"
"L'orgasme et le plaisir sont liés au bonheur, mais aussi à l'indépendance. C'est ce dont on parle avec la masturbation : c'est l'auto-suffisance, le droit à jouir sans avoir besoin de quelqu'un d'autre. Et c'est donc aussi un grand pouvoir subversif"
"Le clito est devenu un symbole militant. Il est lié ces questions de se réapproprier le contrôle de son plaisir et de sa vie... On aimerait avoir une égalité sur la connaissance de nos corps, que l'on ait accès à des cours, que l'on apprenne à mieux connaître notre corps, mais aussi l'accès au plaisir qui devrait être plus égalitaire. 95% des hommes hétéros arrivent à l'orgasme pendant un rapport sexuel et a contrario, seules 65 % des femmes atteignent l'orgasme"
Emblème intime et politique donc. Mais le phénomène culturel Phrygien ne s'arrête pas là.
Non seulement "Clitolympique" (un autre sobriquet) fascine à l'international, mais elle génère aussi toutes sortes de montages et hommages tournant en dérision ses improbables apparitions au fil des tournois sportifs. Le caractère absurde du personnage, affichant toujours un grand sourire Colgate, prête à la cocasserie générale.
Notamment lorsque Phryge se décide à conduire des véhicules (voiture ou hors bord sur la Seine), tenir une arme de tir, rivaliser avec les coureurs olympiques sur plusieurs mètres, ou bien gigote dans tous les sens, en une improbable danse de joie très vite déclinée en gifs.
Oui, Phryge est devenue un meme. Et les internautes se réjouissent de la moindre de ses interventions : "Je veux garder cette Phryge pour toujours dans les rues de Paris, elle est trop adorable ! Elle diffuse trop de joie et de sourires!", "Ma nuit devant la cérémonie de clôture des JO fut tout de même gâchée par le fait de ne pas avoir vu la Phryge", "J’adore les Phryge. Mais regardez leur bouille franchement comment pas les aimer ??", "Phryge est la reine des JO !", "Je veux que la Phryge m’encourage avant chaque réunion, à qui je peux demander?"
La campagne discrète mais efficace autour de Phryge, pas dépourvue d'une certaine autodérision par les décalages qu'elle a pu susciter (les diverses mises en scène autour de la mascotte) ne dénotent pas vraiment d'un certain sens du burlesque typiquement hexagonal : entre le Katerine en tenue d'Adam tout de bleu recouvert faisant honneur aux grands tableaux d'antan et cette effigie un brin déjantée, la culture française a été semble-t-il représentée sous son envers le plus drôlatique.
Bravo pour tout, Phryge.