Depuis les débuts de l'affaire Harvey Weinstein début octobre, des milliers de voix se sont élevées, aux États-Unis, en France et partout dans le monde avec les hashtags #MeToo et #BalanceTonPorc pour dénoncer les hommes qui profitent de leur stature et de leur pouvoir pour harceler, agresser sexuellement ou violer des femmes. Ce mercredi 6 décembre, le Time Magazine a décidé de rendre hommage à celles et ceux qui ont osé "briser le silence" en les sacrant "Person of the Year".
La décision de Time n'est pas anodine. Alors que les leaders Donald Trump, Emmanuel Macron, Mohammed ben Salmane Al Saoud, Xi Jinping ou Kim Jong-un – que des hommes donc – étaient envisagés pour recevoir le titre, l'accorder plutôt à celles et ceux, stars et anonymes, qui ont osé prendre publiquement la parole pour dénoncer leurs agresseurs signe un véritable tournant. Légitime et indispensable, ce mouvement planétaire de libération de la parole est aussi légitimé par Time Magazine qui lui offre en prime sa couverture.
"Les personnes qui ont brisé le silence sur les agressions sexuelles et le harcèlement sont de toutes origines ethniques et sociales, de tous les milieux socio-professionnels et de partout sur la planète. Leur colère collective a produit des résultats immédiats et frappants. Pour leur influence en 2017, elles sont les personnalités de l'année du Time", explique Edward Felsenthal, le rédacteur en chef du magazine.
À la Une du numéro spécial du Time, on retrouve des femmes qui ont, parmi tant d'autres, pris la parole publiquement pour dénoncer le harcèlement sexuel ou les agressions dont elles ont été victimes : l'actrice Ashley Judd, qui a été agressée par Harvey Weinstein, la lobbyiste Adama Iwu qui a lancé dans l'Etat de Californie une campagne contre le harcèlement sexuel en politique, la chanteuse Taylor Swift qui a attaqué en justice un DJ pour harcèlement sexuel, l'ancienne ingénieure Uber Susan Fowler et l'employée agricole Isabel Pascual.
"Les actions galvanisantes des femmes qui font notre Une, ainsi que celles de centaines d'autres, et de beaucoup d'hommes, ont déclenché l'un des changements sociétaux et culturels les plus rapides depuis les années 1960. Les médias sociaux ont agi comme un accélérateur puissant. Le hashtag #MeToo a maintenant été utilisé des millions de fois dans au moins 85 pays", souligne le rédacteur en chef du Time.
Toutefois, s'interroge Edward Felsenthal, que va-t-il se passer maintenant ? Jusqu'où ira ce mouvement de la parole ? Sera-t-il suivi d'un retour de bâton ? "Le plus grand test de ce mouvement sera de mesurer à quel point il peut changer la vie de personnes pour qui dire la vérité est toujours une menace", note-t-il.