Vous êtes en manque de facepalm ? Weight Watchers est là pour ça. La branche américaine du programme de perte de poids dont l'on vous rabat (beaucoup trop) les oreilles à la télé a effectivement lancé le 13 août dernier Kurbo, une application de régime destinée aux enfants de huit à dix-sept ans. Endoctriner les kids à grands coups de programme minceur ? On s'en doute, l'idée n'a pas reçu le plus chaleureux des accueils.
Avec Kurbo, "WW" s'adresse aux enfants et ados par le biais d'une interface inspirée de Snapchat, nous apprend le Time. Et le concept est simple comme bonjour. Il suffit à ces derniers de préciser leur taille, poids, âge, objectifs, tout en détaillant le contenu de leurs repas. Comme c'est souvent le cas dans ce genre d'applis, les aliments sont catégorisés suivant un système de signalisation, du vert au rouge - du "plus sain" au "moins sain", à savoir les aliments à consommer modérément. Ajoutez à cela, quelques propositions d'exercices physiques. Last but not least, Kurbo propose à ses utilisateurs et utilisatrices un coaching personnalisé. Et ce pour la modique somme de 69 dollars par mois. Ça fait rêver.
L'initiative de Weight Watchers est loin de nous faire grimper aux rideaux. Une pétition aux plus de 107 000 signatures relayée sur les réseaux sociaux exige d'ailleurs le retrait de cette appli de mauvais goût. Histoire d'éviter, autant que faire se peut, que nos enfants souffrent à l'avenir de troubles alimentaires. "WW, votre décision de lancer cette application est dangereuse, irresponsable et immorale", y cingle-t-on. Dans les commentaires, des anonymes ayant souffert d'inconstances alimentaires au lycée protestent à l'unisson. Le mot d'ordre ? Il résonne tel un slogan : #WakeUpWeightWatchers. Réveillez-vous ! Et c'est cet éveil des consciences qui parcourt le salutaire texte que la newsletter féministe Les Petites Glorieuses consacre à Kurbo.
Au fil de ce billet d'humeur épinglant la culture du régime, Florence Fortuné relate sa propre "relation" à Weight Watchers. Un programme-minceur qui a "foutu [sa] vie en l'air", dit-elle. Son premier rendez-vous chez la diététicienne date de ses 8 ans. A ses 16 ans, elle s'initie au régime WW et ainsi commence "la descente aux enfers" : ayant perdue 60 kilos en deux ans, la rédactrice fait l'objet d'effets "secondaires" éprouvants ("mon teint était gris, j'avais froid en permanence, mes cheveux tombaient par mèches") et découvre qu'elle est devenue anorexique.
Au final, ses désirs de minceur - et la mise en avant médiatique de programmes prétendument "miracles" - n'ont apporté que "souffrance, détestation de [soi] et danger". Mais également, narre l'autrice, plusieurs passages dans des instituts psychiatriques et beaucoup, beaucoup de résilience...Tout cela pour des maux qui, bien souvent, éclosent dès l'enfance. D'où la violence symbolique du régime "kids friendly" que Weight Watchers nous refourgue avec enthousiasme.
Un cas loin d'être isolé malheureusement. Car, développe Florence Fortuné, le régime est bel et bien une "culture" en cela qu'il nous est vendu partout. Des campagnes publicitaires aux publications Instagram, en passant par les magazines féminins, comment échapper à la dictature de la minceur ? Une banalisation qui engendre mal-être, complexes et autres troubles du comportement alimentaire. "On ne nous a pas appris à avoir une relation saine avec notre poids. On ne nous pas enseigné l'art d'apprécier tous les corps. On ne nous a pas dit que le poids n'était pas un marqueur de notre succès", ajoute encore l'article des Petites Glorieuses, virulent à l'égard de ces entreprises qui se font de l'argent "sur le dos de notre santé".
Et son instigatrice de déplorer : "Il semblerait que nous vivions dans une société où il est normal de policer les corps des enfants". Une hypothèse qui fait vraiment flipper. Et pour la contredire, n'hésitez pas à signer la pétition. Et à scander : #WakeUpWeightWatchers.