Le 11 janvier dernier, nous vous parlions de cette publicité sexiste à Roubaix que le compte Pépite sexiste avait repéré. Pour faire la promotion de sa période de soldes, le centre commercial McArthurGlen avait réalisé une affiche où on pouvait lire ces mots : "Seulement quatre mots peuvent rendre leur sourire aux femmes : 'Je t'aime' et 'Soldes'."
Beaucoup d'entre vous n'ont pas compris le sexisme derrière cette publicité et nombre de nos lectrices et lecteurs nous en ont fait part sur notre page Facebook. On a par exemple pu lire : "Je suis la première à gueuler quand la femme est rabaissé, utilisé, manipulé... mais ça m'est déjà arrivé moi même de faire ce genre d'humour.. du coup.. comment faire la différence entre premier degré et humour? On va devoir censurer tout l'humour? Me sauter pas dessus c'est une vraie question" ou encore "Qui sont les féministes intégristes qui ont jugé ça sexiste ? Débile. Ce sont des réactions comme ça qui tuent la crédibilité des féministes. Perso cette affiche m'amuse."
Une autre nous a demandé : "En quoi c'est sexiste ?". Beaucoup d'internautes ont trouvé cette publicité "rigolote".
Il en est allé de même pour le journaliste Pascal Praud qui, vendredi, dans son émission sur RTL, répondait à une auditrice qui ne comprenait pas la polémique autour de cette publicité de Roubaix. L'animateur a invoqué le second degré et s'est étonné "qu'il n'y ait plus de place pour l'humour".
Il a même évoqué des attaques dignes des "procès Staliniens" et parle de l'action féministe comme d'une "tyrannie des minorités actives".
Sans doute faut-il réexpliquer pourquoi cette publicité de Roubaix était sexiste, comme celle d'Aubade avant elle au mois de décembre. On pouvait en effet trouver sur un panneau immense sur la façade des Galeries Lafayette à Paris, une photo montrant les fesses d'une femme sans tête dans une position impossible.
Toute ces publicités ont un point commun : elles sont sexistes. La première chose à se demander quand on parle de publicité sexiste, c'est d'inverser les rôles. Imaginerait-on un homme fesses cambrées sans tête pour faire la promotion d'un slip ? On trouverait cela sans doute ridicule. Aubade sexualise les femmes à travers un regard masculin. A aucun moment, les femmes ne sont présentées comme étant actrice de leur sex-appeal.
Concernant la publicité de Roubaix, c'est du sexisme du quotidien. Celui qui émaille nos vies de femmes et qui se cache dans toutes les interstices. Que cela soit dans la vie de couple, de famille, sur les panneaux publicitaires en allant au boulot. C'est une somme de ces petites choses qui nous est aujourd'hui insupportable.
Dire qu'une femme n'aime que les soldes pour avoir le sourire, c'est utiliser bassement un cliché pour faire rire, sans aucune intelligence. Peut-on parler des soldes sans tomber dans le cliché ? Sans aucun doute. Parce qu'associer les femmes avec l'hystérie des promotions, c'est un cliché. On attend la même publicité avec à la place : "Qu'est-ce qui fait sourire les hommes : les soldes".
Plutôt que de rabaisser les femmes à des stéréotypes qui les enferment, ne peut-on pas imaginer des publicités qui les inspirent et qui les mettent en valeur plutôt que de rire à leurs dépends ?
La réponse de Pépite sexiste à Pascal Praud
D'ailleurs, Pépite Sexiste a voulu répondre à Pascal Praud qui représente une voix qui correspond à celle de nos lectrices : "Monsieur Praud, l'humour a bon dos quand il s'agit de banaliser le sexisme. Détrompez-vous, les françaises et les français ont de l'humour, c'est le sexisme et les stéréotypes qu'ils et elles rejettent.
En ce qui me concerne, je ne détournerai pas les yeux et continuerai de dénoncer les stratégies marketing qui nous infligent une vision des femmes et hommes non seulement périmée mais néfaste pour l'égalité.
Il est certes plus facile de critiquer la "minorité active" qui lutte à abolir le sexisme ordinaire que de réfléchir aux conséquences de la banalisation du sexisme par l'humour. Aussi, je vous invite vivement à prendre connaissance du rapport du Haut Conseil à l'Egalité qui sera présenté ce jeudi 17 janvier à l'occasion du premier État des lieux du sexisme en France.
Cette première édition s'intéressera justement aux injures et à l'humour sexistes, deux phénomènes qui bénéficient actuellement d'une grande tolérance sociale."
Il est temps de montrer qu'au-delà du cas particulier de Roubaix, les femmes baignent dans un sexisme maladif. Il est essentiel et urgent d'en sortir.