C'est une affirmation qui ne date pas d'hier, mais qui prend une nouvelle ampleur à l'heure du coronavirus et de la vaccination à venir. "Il est probable qu'effectivement, les vaccins contre le Covid-19 soient plus efficaces chez les femmes", estime le professeur Jean-Daniel Lelièvre, chef du service des maladies infectieuses de l'Hôpital Henri-Mondor et membre de la Haute autorité de santé (HAS).
Le spécialiste détaillait son analyse ainsi : "Beaucoup de gènes de l'immunité sont sur le chromosome X. Or, les femmes ont deux chromosomes X, alors que les hommes n'en ont qu'un." Cependant, rien de nouveau sous le soleil : "On sait que pour un très grand nombre de vaccins, l'efficacité est supérieure chez les femmes", poursuivait-il. "Les femmes se défendent mieux que les hommes face aux maladies infectieuses".
D'ailleurs, les hommes sont aujourd'hui plus concernés par les formes sévères du Covid-19, et les séjours en réanimation, quand les femmes semblent plus atteintes par le Covid long, soit la présence de symptômes pour une durée supérieure à trois semaines.
Cette déclaration, une étude menée par le CHU de Strasbourg et l'Institut Pasteur publiée le 18 novembre vient l'appuyer. Ainsi, les chercheur·se·s observaient que le taux d'anticorps baissait plus rapidement chez les patients que chez les patientes. Pour la professeure Samira Fafi-Kremer, directrice de l'Institut de Virologie de Strasbourg, cette meilleure défense pourrait provenir des hormones. "Il y a peut-être aussi une explication hormonale, l'oestrogène joue peut-être un rôle", avance-t-elle.
"De réaliser que les femmes gardent une immunité plus longtemps peut permettre d'adapter la vaccination, réfléchir à quel dosage, à quelle périodicité en fonction de si on est une femme ou un homme", poursuit la professeure Samira Fafi-Kremer. Pour le professeur Jean-Daniel Lelièvre en revanche, rien n'est encore décidé. Principalement car plusieurs éléments qui permettraient de se positionner sur une différenciation genrée, et même confirmer l'hypothèse d'une plus grande efficacité chez les femmes, sont encore à l'étude.
"On attend de pouvoir consulter l'ensemble des dossiers (relatifs aux essais cliniques) qui sont pour l'instant à la disposition des experts des autorités qui étudient la conformité des vaccins, c'est-à-dire l'Agence nationale de sécurité du médicament en France", souligne le scientifique, qui insiste sur le fait plusieurs points doivent encore être éclaircis.
Dominique Deplanque, professeur de pharmacologie médicale et directeur du Centre d'investigation clinique du CHU de Lille, déclarait quant à lui à LCI qu'il était possible que "l'évaluation de l'efficacité d'un vaccin contre le Covid soit différenciée en fonction du profil de population du fait d'éventuels effets spécifiques observés sur les patients âgés ou chez les patients obèses". Une hypothèse qui signifie que, pour obtenir davantage d'efficacité ou "pour écarter tout risque, les autorités pourraient en effet décider que tel ou tel vaccin pourrait être administré à telle population et pas une autre". Affaire à suivre.
Agence nationale de sécurité du médicament