"Née au Canada, élevée à Los Angeles et vivant à San Francisco, Alanis aime le bouillon, a grandi en mangeant le goulasch hongrois de sa mère et ne se souvient plus des repas de son mariage". C'est ainsi que se présente à nous le dernier épisode du podcast Table Manners, présenté par Jessie et Lennie Ware. Avec comme invitée de renom, la chanteuse Alanis Morissette. Mais si l'interprète de "Ironic" est venue s'attarder au micro, ce n'est pas juste pour parler bouffe. C'est un sujet plus tabou que l'artiste a abordé : la dépression post-partum - c'est à dire les six semaines qui suivent l'accouchement, sources de changements physiques et émotionnels. Une souffrance qu'elle a porté sur elle durant le confinement.
Plus précisément, Alanis Morissette nous explique avoir subi une dépression post-partum après la naissance de son premier enfant - mais aussi de son deuxième - et une "anxiété" post-partum sévère suite à la naissance de son dernier. Mais durant cette exceptionnelle période d'isolement global, elle n'a que davantage ressenti cette anxiété. "Fondamentalement, je ne suis pas moi-même depuis deux ans [...] Je pense qu'au minimum [une dépression post-partum] peut durer deux ans quand elle n'est pas traitée", relate-t-elle encore. Entre deux appels à sa médecin, la chanteuse s'est demandée comment lâcher-prise. L'angoisse ? Que la situation empire.
L'air de rien, celle qui a écrit tout un pan de notre teen culture nous alerte sur le manque d'informations auquel se heurtent les femmes concernées. Comment expliquer au juste cette anxiété qui laisse K.O. ? Et y remédier ? Alanis Morissette raconte : "Il est difficile de l'expliquer, à moins que quelqu'un l'ait vécu également, c'est trop difficile à mettre en mots".
"J'éprouvais encore cette anxiété au moment du confinement. Collectivement, en tant que planète, nous étions tous en train de nous battre, de fuir, de nous effondrer", nous explique l'artiste. Terreau d'émotions intenses et contradictoires, entre pensées morbides et soif de survie, le confinement l'a renvoyé à ses dépressions post-partum - ou "post-natale", c'est selon. Le collectif, cela compte quand on parle de ce phénomène qui meurtrit la santé mentale (et physique). Car comme nous le rappelle le magazine Stylist, la dépression post-partum touche plus d'une femme sur dix au Royaume-Uni. Et là-bas comme ailleurs, la parole se libère enfin. En France par exemple, où le hashtag #MonPostPartum est venu ouvrir la voie.
Mais si plus personne désormais ne peut l'ignorer, comment combattre au juste ce mal-être si compliqué à définir ? On s'en doute, la musicienne n'a pas de baguette magique. Mais simplement un conseil personnel : en parler. Ne pas rester isolée. Ne pas craindre d'exprimer ses failles et de demander de l'aide, aux professionnelles de la santé comme à ses proches. Suite à cette longue période de confinement, la chanteuse l'affirme d'ailleurs sans détour : "nous sommes des animaux sociaux, nous avons besoin les uns des autres". Difficile de la contredire.
Les mots d'Alanis Morissette touchent, mais ils n'étonnent - malheureusement - pas tant que ça. Car si l'on en croit une récente étude américaine, les risques de dépressions post-partum se seraient dangereusement amplifiés durant la pandémie de coronavirus. Anxiété généralisée, accès aux soins restreint, stress supplémentaire, solitude accrue... La covid-19 n'a en rien allégé la situation, l'on s'en doute. Raison de plus pour en parler.