L'homme politique de l'année 2018 est une femme. Ce n'est pas nous qui le disons mais GQ. Comme chaque année, le magazine masculin, propriétaire de Condé Nast, a remis hier lors d'une cérémonie au Trianon ses prix aux personnalités qui ont fait l'année passée et seront encore là l'an prochain.
Parmi les hommes récompensés (Benjamin Biolay auréolé chanteur de l'année ou encore Mathieu Gallet, sacré homme média de l'année), deux femmes se distinguent : la chanteuse Juliette Armanet, dont l'album Petite Amie a ressuscité une chanson française moribonde, et surtout la maire de Paris Anne Hidalgo, consacrée "homme politique de l'année" par GQ pour son combat pour remporter l'attribution des Jeux Olympiques 2024 et surtout son obstination à éradiquer le tout-voiture dans la capitale.
Le choix de GQ de désigner une personnalité aussi clivante, honnie par les automobilistes et une bonne partie de la droite, pourrait surprendre. Pourtant, Anne Hidalgo mérite amplement ce titre de politique de l'année.
D'abord pour avoir décroché l'attribution des Jeux Olympiques 2024 – cent ans après la première réception de Paris - au terme d'un combat sans merci avec la grande rivale Los Angeles. Un accord a même été trouvé entre les deux villes : Paris obtient les Jeux de 2024, L.A. ceux de 2028, et un accord de coopération a été conclu. Les deux mégalopoles s'engagent à lutter conjointement contre le dérèglement climatique et pour la protection de l'environnement, pour la solidarité et l'inclusion, ainsi que l'aide à l'implantation de start-ups.
Mais c'était sans compter sur la grogne des automobilistes, qui ont moyennement goûté les aménagements des bords de Seine réalisés par la Mairie de Paris. Depuis avril dernier, après des mois de batailles sur les chiffres et de polémiques sur les embouteillages, les voies sur berges ont été rendues aux promeneurs et aux cyclistes, ce qui a largement alimenté le "Hidalgo bashing".
Mais Anne Hidalgo ne compte pas s'arrêter là. La maire de Paris a dévoilé en début d'année son grand projet de piétonnisation de la capitale. Trottoirs élargis et végétalisés, parcs et squares revalorisé... D'ici 2020, si la mairie va au bout de son projet, la voiture devrait avoir largement perdu du terrain sur la ville, réinvestie à l'occasion par les piétons et les transports en commun. "La voiture occupe 50 % de l'espace public parisien alors qu'elle représente seulement 13 % des déplacements. Nous voulons la remettre à sa juste place", exppliquait en février au Parisien Magazine Christophe Najdovski, adjoint écologiste (EELV) aux Transports.
Le prix décerné par GQ arrive à point nommé pour Anne Hildalgo. Selon le magazine Capital, la maire PS de Paris aurait occupé un emploi fictif au début des années 2000 au ministère du Travail. Le 7 novembre dernier, c'était au tour du Canard enchaîné d'affirmer que l'élue aurait touché 116 000 euros de traitements entre 2001 et 2002 alors qu'elle était déjà première adjointe à Bertrand Delanoë et n'aurait sans doute pas eu beaucoup de temps à consacrer à son poste au ministère.
Si Anne Hildalgo a annoncé qu'elle allait porter plainte pour diffamation, ces nouvelles affaires alimentent l'animosité de ses détracteurs. À Paris, l'opposition de droite a annoncé qu'elle comptait demander des comptes à l'élue PS. "Il ne s'agit pas de polémiquer inutilement mais d'avoir une bonne fois pour toutes des explications de la maire", a expliqué au Parisien Florence Berthout, la patronne du groupe LR au Conseil de Paris.
Anne Hidalgo, pour le moment, tient bon. Dans un long entretien accordé à M le Monde, la maire de Paris analysait le week-end dernier : "Est-ce que vous connaissez des politiques qui sont en vue et qui n'ont pas de détracteurs ? Non. Est-ce qu'il y a une place particulière qui est réservée aux femmes dans la vie politique ? Oui. Forcément, ça n'est pas agréable de vous voir caricaturer par des adversaires qui, d'ailleurs, essayent toujours de se faire prendre en photo avec vous. Donc je dois être un peu populaire..."