Être une femme libre n'est aujourd'hui toujours pas possible dans tous les pays du monde. Sortir du lot, relever la tête, se faire remarquer semble insupportable aux yeux de certain·es. Libre, l'influenceuse irakienne Tara Farès l'était. Elle s'est fait assassiner en pleine rue à Bagdad au volant de sa voiture le 27 septembre.
Le moment où elle se fait tirer dessus, dans la tête et dans le thorax, a été filmé par des caméra de surveillance. On peut y voire sa voiture avancer lentement dans une rue étroite et percuter une voiture garée sur le bas côté. Les deux hommes lui ayant tiré dessus se sont ensuite enfuis en scooter.
Son petit ami qui l'accompagnait l'a emmenée aux urgences, mais il était déjà trop tard. Si une enquête a déjà été ouverte, on ne connaît pas encore les motivations de cet acte.
Cette ancienne Miss Bagdad recevait régulièrement des menaces de mort. Elle n'avait que 22 ans et était suivie par 2,7 millions de followers sur Instagram. Elle s'affichait portable à la main et souvent clope au bord de ses lèvres pulpeuses et maquillées. Son attitude était loin de faire l'unanimité. Le journal Le Monde rapporte les propos d'un animateur de télévision irakien qui a déclaré sur les réseaux sociaux que Tara Farès était "une pute qui méritait d'être tuée".
Le 29 septembre, Shaima Qassem, Miss Irka 2015, publiait une vidéo sur Snapchat pour avertir le public qu'elle avait également reçu des menaces de mort. Une reproduction de sa vidéo sur Youtube a été visionnée plus d'un million de fois.
Les messages lui signifiaient par exemple "Tu es la prochaine", comme le rapporte le média Al Arabiya . En pleurs face à la caméra, la jeune femme dénonce : "Sommes-nous coupable d'être célèbres et d'apparaître dans les médias ? Nous sommes abattues comme des poulets."
Elle avait déjà reçu des menaces au lendemain de son élection de la part de Daesh qui l'avait appelée par téléphone pour lui demander de le rejoindre. Si elle refusait, le groupe terroriste la menaçait de kidnapping. Elle avait été la première Miss Irak depuis plus de 40 ans en 2015.
C'est donc une véritable série noire meurtrière qui semble se profiler dans la région, visant les femmes influentes sur les réseaux sociaux et qui refusent de faire profil bas. Deux jours avant l'assassinat de Tara Farès, c'est la militante des droits humains et femmes d'affaire Souad al-Ali qui avait également été abattue dans sa voiture de plusieurs balles dans la ville de Bassora dans le sud de l'Irak.
Deux directrices de centre de beauté ont également été retrouvées mortes à leur domicile en août, Rafif al-Yassiri et Racha al-Hassan, sans que l'on sache comment elles étaient décédées, et cela malgré l'ouverture d'enquêtes. La première était chirurgienne esthétique et était surnommée la "Barbie d'Irak".
Ces assassinats sont prises au sérieux par les autorités irakiennes. Le premier Ministre irakien Haider al-Abadi a demandé aux unité d'élite du renseignement d'enquêter sur ces différentes affaires. Il a fait paraître un communiqué, repris par l'AFP, expliquant que "des éléments laissant à penser qu'il y a un plan décidé par des parties organisées pour perturber la sécurité, sous prétexte de lutter contre la dépravation."
Dans un dernier message sur Instagram, une photo en noir et blanc de Tara Farès est accompagnée de cette phrase : "Dans un incident traître et lâche, Tara Fares Chamoun, est avec Dieu. Nous avons demandé à Dieu de l'accueillir avec sa grande miséricorde."