Pourtant championne nationale des moins de 18 ans sur 100 mètres, l’Indienne Dutee Chand est actuellement privée de compétition. Conformément au règlement de l’Association des fédérations internationales d’athlétisme (IAAF), la jeune femme a dû se soumettre, il y a quelques semaines, à un « test de féminité » qui a révélé une hyper androgénie. Résultat, l’athlète a été interdite de participation aux XXe Jeux du Commonwealth qui se sont déroulés l’été dernier à Glasgow (Écosse). En effet, ce dispositif très controversé écarte des pistes d’athlétisme les femmes présentant un taux de testostérone trop élevé sous prétexte que cette hormone aurait la particularité d’accroître la masse musculaire et donc d’améliorer les performances sportives.
Et alors que l’IAAF assure que sa règlementation vise à « maintenir l’égalité de la compétition », Dutee Chand, elle, se dit « détruite ». Au New York Times, elle n’a pas caché avoir « pleuré pendant trois longs jours après avoir lu les commentaires des internautes à son sujet. « Ils s’interrogeaient : "Dutee : fille ou garçon ?" Et je pensais : "Comment pouvez-vous dire ça ? J’ai toujours été une fille" ». Mais aujourd’hui, c’est une sprinteuse combative qui a fait part de son intention de contester cette décision. « Je n’ai pris aucun médicament, je n’ai fait aucune faute, pourquoi ai-je été visée ? », s’est-elle interrogée auprès de l’Agence France Presse. Et d’ajouter : « On m’a dit que je devrais être opérée ou suivre un traitement hormonal si je voulais sauver ma carrière. J’ai été abasourdie d’entendre cela. C’est si cruel. Dieu m’a faite ainsi. Je ne veux rien changer et je ne veux pas abandonner le sport ». Soutenu par un chercheur, elle a donc déposé, le mois dernier, un recours devant le Tribunal arbitral du sport. « Les autorités me soutiennent dans mon combat. Je sens que tout le pays est derrière moi. J’espère et je prie pour que mon cas crée un précédent afin que d’autres comme moi n’aient pas à connaître un tel traumatisme », a-t-elle encore confié.
Car si Dutee Chand est la première à contester le règlement de l’IAAF, elle est loin d’en être la première victime et notamment dans son pays. Pour preuve, en 2006, sa compatriote Santhi Soundarajan s’était déjà vue retirer sa médaille d'argent obtenue sur 800 mètres aux Jeux Asiatiques après un test de genre. Six ans plus tard, lors de la même compétition, c'est Pinki Pramanik, vainqueur du relais 4x400 mètres, qui était accusée d'être un homme, avant d’être finalement blanchie.
Enfin, plus récemment, en 2009, l’athlète sud-africaine Caster Semenya, médaillée d’or sur 800 mètres lors des championnats du monde de Berlin avait été privée de son titre mondial et de compétition pendant près d’un an. Elle n’avait été ré-autorisée à concourir qu’en juillet 2010, et avait porté le drapeau de son pays lors de la cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques de 2012. Mais c’est à la suite de cette dernière affaire que l’instance dirigeante de l’athlétisme mondial avait instauré la règle selon laquelle une personne dont l’état civil est féminin ne serait habilitée à concourir dans la catégorie femmes que si son niveau de testostérone est inférieur au taux minimal enregistré chez les hommes.