Philippe Vignal* : La mastectomie ou mammectomie prophylactique est une ablation préventive de tout ou une partie des seins, en vue d’éviter un cancer du sein. En général elle consiste à retirer le sein en entier, y compris la partie qu’on appelle « aréole », cette zone pigmentée autour du mamelon, et le mamelon. Les mastectomies étaient auparavant uniquement sous-cutanées, mais on s’est aperçu qu’elles n’étaient pas efficaces. L’aréole contient beaucoup de tissus glandulaires, or il faut en laisser le moins possible pour éviter les cancers. Cette ablation est donc souvent accompagnée d’une reconstruction mammaire et d’un tatouage cutané pour recréer l’esthétique de l’aréole et du mamelon.
P. V. : Il s’agit de la technique préventive la plus efficace, même si elle ne protège pas à 100%. On sait que 2% des femmes qui subissent une mastectomie prophylactique font tout de même un cancer du sein. On peut estimer d’autre part qu’il s’agit d’une opération très lourde, pour prévenir un cancer que la patiente n’est pas sûre de contracter, et du reste un cancer qu’on soigne de mieux en mieux par ablation de la tumeur.
P. V. : Aux Etats-Unis c’est assez répandu. En France c’est autorisé pour toutes les patientes atteintes d’une anomalie génétique appelée mutation du gène BRCA1 ou BRCA 2. Le risque de cancer du sein et de l’ovaire est considérable pour ces femmes. Mais on peut estimer qu’il n’y a pas eu plus d’une trentaine d’opérations préventives en France depuis cinq ans.
P. V. : Je pense que la réticence vient à la fois des praticiens et des patientes. Aux États-Unis, il y a une culture de la « prévention primaire » bien plus développée que chez nous. J’entends par prévention primaire trois techniques : l’ablation des seins (mammectomie), le traitement chimique à base d’anti-oestrogènes, et l’ablation des ovaires. Sachant que l’ablation des seins diminue le risque de cancer du sein de 90% et l’ablation des ovaires et les médicaments de 50%. En France, nous sommes davantage portés sur la prévention « secondaire », soit le dépistage et le traitement anti-récidive.
P. V. : Il faut combiner le dépistage de cette anomalie et l’examen des antécédents familiaux. Lorsque deux cancers du sein ont été détectés dans une même famille, le cancérologue préconise un dépistage génétique.
*Philippe Vignal est gynécologue et auteur de « L'enfer au féminin, sortir du cycle règles-cancer » (La Martinière).
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