"La fonction de l'artiste dans une société perturbée est de faire prendre conscience de l'univers, de poser les bonnes questions et d'élever l'esprit". Avec cette phrase, l'artiste serbe Marina Abramovic pose les bases d'un art militant qui ne servirait pas seulement à faire joli dans un salon - notion qu'explique aussi Picasso, l'illustre auteur du tableau Guernica s'il ne fallait citer qu'un exemple de son oeuvre révoltée et révolutionnaire.
En découvrant de plus en plus de comptes de céramique féministe, on peut se demander si créer des pots en forme de seins ne serait pas de la même veine. Une façon de représenter le corps de la femme, ses différences, la richesse de la diversité qu'on peine encore à voir aujourd'hui. Représenter aussi le plaisir féminin, normaliser ce qui a longtemps été mis sous scellé, rendu tabou. Une nouvelle vision de la féminité, plus hétéroclite, moins conditionnée.
Et en même temps que le genre devient tendance, libérer la parole autour des problématiques liées au genre. En posant la question de la "pudeur" sexiste par exemple : pourquoi un homme aurait-il le droit de montrer son torse sur les réseaux sociaux et pas les femmes ? Cette nouvelle tendance trouve le moyen d'échapper aux modérations coriaces d'Instagram ou de Facebook, qui dépenseraient presque plus d'énergie à bannir des tétons de femmes qu'un post raciste.
Avec les créations de Rose Grown, des vases aux lignes rondes et douces qui s'inspirent de poitrines de toutes formes, on peut glisser l'air de rien une paire de seins asymétriques sur un rebord de cheminée, offrir une tasse avec des petits qui pendent à des ami.es, combler son ou sa partenaire avec à un vase aux attributs ballants.
Flora In the Garden propose aussi sa version de tasses aux loches mais pas que. Elle est d'ailleurs plutôt célèbre pour son modèle de coupe dessinée d'un corps de femme au verso, d'homme au recto, créée au tourneur dans son jardin. Même procédé pour Does My Nipple Offend You?, artiste britannique qui manie l'art du téton comme personne, ou encore Take Awei, la marque australienne qui crée des vide-poches seins-boliques.
Au Royaume-Uni, on retrouve aussi une autre façon de s'approprier la céramique : en modelant des sextoys. Des pénis tout lisses que l'on peut d'ailleurs décorer à l'envi avec de la peinture, des pochoirs ou encore mieux, des autocollants dans le petit atelier du quartier d'Hackney d'Adele Brydges - et qui feraient autant de bien que leurs cousins en plastique. La masturbation écolo.
Il ne reste plus qu'à développer l'idée de ce côté de la Manche, où l'on se passionne davantage pour la broderie féministe.
La preuve.