Pendant la Fashion Week automne-hiver 2019 de Paris, qui a eu lieu au mois de février, la mannequin Olivia Anakwe a fait l'expérience d'une situation trop fréquente : aucun·e coiffeur ou coiffeuse ne savait s'occuper de ses cheveux crépus. Impliquant qu'ils différeraient de la "norme", sous-entendu des cheveux caucasiens.
"On m'a demandé de me lever d'une chaise vide, puis les coiffeurs me tournaient le dos de façon flagrante quand je m'approchais d'eux pour me faire coiffer ", raconte Olivia Anakwe sur son compte Instagram. "Je suis arrivée dans les coulisses où ils avaient prévu de faire des cornrows, mais pas un seul membre de l'équipe ne savait comment les faire sans même l'admettre."
Elle a fini par demander à plusieurs mannequins, puis à l'esthéticienne en charge des ongles de tresser ses cheveux, une initiative qui déroge complètement de son rôle et qui la révolte. "Ce n'est pas bien, ce ne sera jamais bien. Cela doit changer. Quelle que soit la taille de votre équipe, assurez-vous d'avoir une personne compétente pour s'occuper des cheveux afro OU embauchez simplement un coiffeur noir ! Les coiffeurs noirs sont tenus de savoir comment coiffer tout le monde, pourquoi la même chose ne s'applique-t-elle pas aux autres ?"
Blessée, elle confie s'être sentie ignorée et oubliée. "Malheureusement, je ne suis pas la seule", ajoute-t-elle. "Les modèles noires avec des cheveux de texture afro sont continuellement confrontées à ces circonstances injustes et décourageantes. Nous sommes en 2019, il est temps de faire mieux que ça".
Un cri du coeur qui dénonce une injustice récurrente, dont beaucoup d'autres personnes ont aussi été victimes. Sur Twitter, l'anecdote a été reprise par plusieurs personnalités qui dénonce cette différence de traitement raciste. Parmi elles et eux, Yahya Abdul-Mateen II, acteur à l'affiche de The Get Down, Aquaman ou encore du film Us, avec Lupita Nyong'o.
"100% des acteurs et actrices noirs à qui j'ai parlé de ce sujet sont confrontés à la même chose au cinéma et à la télévision. Les coiffeurs et coiffeuses de notre industrie devraient avoir reçu une formation adéquate ET être en mesure d'en faire la preuve. Trop souvent, ils commencent à 'comprendre' à la seconde où nous nous asseyons sur la chaise", déplore-t-il.
Aujourd'hui, le cheveu crépu a pris une dimension politique. A l'occasion de la sortie de son livre Trop crépues, Aurélie Louchart explique notamment à Cheek que cette discrimination est "le fruit de l'histoire. Le résultat d'années et d'années de racisme. Ça fait partie de la stigmatisation du corps noir. Ensuite, les critères de beauté dominants se basent sur les blancs, donc ce sont les cheveux lisses qui sont mis en avant, pas les cheveux crépus. (...) Ça prend du temps de déconstruire ce qui est ancré dans l'imaginaire collectif."