Jean-Pierre Nadir : Le Web a sonné la fin de l’obscurantisme. Avant Internet, on avait comme seule source d’information les magazines et les agences de voyage, avec un accès à l’information quasiment impossible pour le voyageur. Aujourd’hui, on a la capacité à avoir un accès en direct live l’information et une vue d’ensemble sur tout ce qui est possible, on peut comparer en temps réel les prix, les prestations, les offres. L’autre dimension qu’offre le Web, c’est l’information glanée auprès des particuliers, via les blogs, les avis des autres clients. Cela a totalement changé la donne, on ne se contente plus désormais des conseils de sa famille et de ses amis. Par ailleurs, Internet a donné un pouvoir aux consommateurs. Contrairement à l’inertie qui régnait avant, aujourd’hui un simple post en temps réel sur un site a un impact. Le client est devenu le premier ambassadeur de la marque, il détient un vrai pouvoir et est devenu un acteur important dans la chaîne du voyage. Ces trois dimensions mises bout à bout, le rapport au voyage change totalement.
J.-P. N. : Le voyageur d’aujourd’hui est malin et opportuniste. Désormais, il favorise la logique d’achat de dernière minute. 40% des voyageurs achètent ainsi leur séjour dans les 15 derniers jours, ce qui a évidemment beaucoup changé la façon de fonctionner des tour operator. Entrent aussi en jeu les leviers suivant : la crise qui a développé la notion de saisir une opportunité, la compréhension des mécanismes du marketing touristique (plus j’attends, moins c’est cher) et la démocratisation du voyage. Aujourd’hui, le vacancier valorise une prestation plus qu’une destination. Il définit un budget et tente de trouver le produit le mieux adapté pour ce budget. Partir moins loin, moins longtemps, moins cher : c’est aussi dans l’air du temps.
J.-P. N. : C’est simple : il faut être le plus pertinent, le plus transparent et le plus vrai possible. Il faut également bien connaître les produits et les destinations que l’on vend et être légitime. Désormais, alors que les agences physiques n’ont plus de réelle valeur ajoutée par rapport aux acteurs du e-voyage, il faut savoir brasser les informations, les trier et les rediriger vers les internautes. D’ailleurs, depuis quatre ou cinq ans, les acteurs traditionnels du secteur ont compris qu’ils n’avaient plus le choix et qu’il fallait accompagner ce mouvement du voyage en ligne. Ils s’y sont fait, en créant leurs sites, en développant un rapport de vérité au produit avec un discours transparent, en apportant aussi de la souplesse au consommateur dans le choix des produits. Et puis ils sont montés en gamme en termes de prestation, en valorisant leur marque, notamment autour de leurs clubs de vacances.
J.-P. N. : Cela fait cinq ans que je dis qu’il ne faut pas d’avis anonymes. Ce qui est important n’est pas tant ce qui est dit, mais qui le dit : une vraie personne, avec un vrai profil, qui sont deux critères garantissant un vrai avis. Dans ce cas, le voyageur peut comparer les ais, les confronter à ses propres goûts, et alors ces commentaires ont un vrai impact. Je crois beaucoup à l’importance des photos des commentateurs, à l’incarnation des profils. Et puis la deuxième exigence à avoir, c’est la présence de modérateurs, pour s’assurer de l’authenticité des avis et pour organiser une communauté de membres. Aujourd’hui, le participatif doit aussi être récompensé, il faut savoir inciter les voyageurs à s’exprimer en ligne. Ce en développant une logique de membres experts qui bénéficieraient d’avantages liés à leur activité sur le site et aux avis qu’ils laissent. C’est encore à améliorer.
* L’institut CSA a réalisé pour Orange et Terrafemina la 16e vague d’un baromètre portant sur les pratiques des Français sur Internet. Cette vague s’est intéressée plus précisément au développement du e-tourisme. 711 internautes français étant partis en vacances l’année dernière** ont été interrogées en ligne du 19 au 21 mars 2013, issus d’un échantillon national représentatif de 1001 internautes français âgés de 18 ans et plus. L’échantillon a été constitué selon la méthode des quotas appliquée aux variables suivantes : sexe, âge et catégorie socioprofessionnelle après stratification géographique par région de résidence.
** Ces personnes ont été sélectionnées selon leurs réponses à la question suivante : Au cours des 12 derniers mois, êtes-vous déjà parti de votre lieu de résidence habituel pour au moins 4 nuits consécutives, pour vos loisirs ?
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