Alors que les élections législatives ont confirmé l’avènement d’une vague rose dans les institutions françaises, l’Assemblée nationale change de visage dès cette semaine, accueillant ses nouveaux députés. Ces derniers doivent dès mardi avoir formé leurs groupes parlementaires. Il s’agit d’association de députés de même couleur politique, mais n’appartenant pas forcément au même parti. Selon l’article 19 du règlement de l'Assemblée nationale, il faut au moins 15 députés pour former un groupe. Un seuil qui a évolué au fil des ans : jusqu’en 1988, il fallait 30 députés pour former un groupe, chiffre abaissé à 20 puis à 15 en 2009 suite à la révision constitutionnelle de 2008. La semaine dernière, Jean-Marc Ayrault a fait savoir qu’il ne serait par ailleurs pas opposé à un abaissement du seuil à 10 membres pour fonder un groupe parlementaire, comme cela est déjà le cas au Sénat. Il est également possible pour les députés d’uniquement s’apparenter à un groupe sans en faire pleinement partie, afin de conserver d’avantage de liberté de parole.
L’Assemblée sortante comptait quatre groupes. Le premier, le groupe de l’UMP, présidé par Christian Jacob, qui comprenait 320 députés (293 issus de l'UMP, 18 radicaux, 3 chrétiens-démocrates et 6 apparentés). Le second est le groupe composé des socialistes, radicaux, citoyens et apparentés qui comprend 204 députés (190 socialistes, 7 radicaux de gauche, 5 divers gauche, 1 MRC et 1 apparenté) et était présidé par le socialiste Jean-Marc Ayrault.
Le groupe de la gauche démocrate et républicaine, présidé par Roland Muzeau (PCF), comprenait 20 députés (16 communistes et apparentés, 2 du Parti de gauche, 1 du Parti communiste réunionnais et 1 du Mouvement indépendantiste martiniquais). Les 4 députés d'EELV ont quitté le groupe en novembre 2011.
Au lendemain des élections, les négociations démarrent pour fonder ces groupes. EELV, fort de ses 18 députés, pourra constituer pour la première fois son propre groupe. Le Front de gauche, ayant obtenu seulement 13 députés, devra quant à lui approcher des élus hors de son parti afin de pouvoir constituer son groupe, indépendamment du PS. La formation des groupes sera effective mardi.
Une fois les groupes formés, ils décident de se déclarer d’opposition ou non. Ceux qui décident de ne pas se déclarer d’opposition mais qui n’appartiennent pas à la majorité, sont d’emblée qualifiés de « groupes minoritaires ». Appartenir à l’un de ces groupes est essentiel à tout parlementaire s’il veut faire entendre ses idées et avoir les moyens de défendre ses projets de loi. En effet, les temps de parole, les postes de responsabilité (bureau du Sénat, bureau de l'Assemblée nationale, bureaux des commissions), les sièges en commissions et les places dans l'Hémicycle sont répartis à la proportionnelle entre les groupes, chacun effectuant ensuite sa propre répartition interne. Sans groupe, un député ne peut prétendre à tout cela. Avoir un groupe, c’est avoir systématiquement un temps de parole sur tous les textes, ce qui n’est pas le cas d’un député non-inscrit, qui n’a quasiment aucune chance de voir sa proposition de loi inscrite à l’ordre du jour.
Appartenir à un groupe, c’est aussi pouvoir disposer de moyens financiers et humains supplémentaires : les groupes bénéficient, en plus des assistants de leurs députés, de chargés de mission qui gèrent l’intendance et assurent les « fonctions supports ». Ce, en mutualisant les tâches qu’il serait inutile de voir chaque député effectuer lui-même (argumentaires sur les textes de loi…). Les députés non-inscrits, comme ceux du FN, ne peuvent compter que sur leurs propres assistants. Par ailleurs, les présidents de groupe ont la possibilité d’assister à la Conférence des présidents qui organise les débats et fixe le calendrier de l’examen et de la discussion des textes : il s’agit de l’instance où tout se décide, où les informations circulent en premier lieu, bref, un lieu incontournable de la vie parlementaire. Les groupes parlementaires ont ensuite des places réservées dans les huit commissions permanentes (affaires culturelles et éducation, affaires économiques, affaires étrangères, affaires sociales, défense nationale et forces armées, développement durable et aménagement du territoire, finances, lois) en fonction de leur importance numérique. Bref, sans rattachement à un groupe parlementaire, il est difficile, voire impossible pour un député non-inscrit de faire entendre sa voix et de peser dans le débat à l’Assemblée, à moins d’être une figure politique nationale incontournable.
Crédit photo : Assemblée nationale
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