Culture
« La Couleur des sentiments » : confidences de Kathryn Stockett
Publié le 26 octobre 2011 à 09:15
Par Marine Deffrennes
Du best-seller de Kathryn Stockett au film de Tate Taylor, « La Couleur des sentiments » a séduit le monde entier. Le premier roman de l'éditrice new-yorkaise était voué à devenir culte, le film suit le même chemin et sort aujourd’hui dans les salles françaises. Rencontre avec Kathryn Stockett et son meilleur ami, Tate Taylor, pour débriefer sur le succès de l'année.
« La Couleur des sentiments » : confidences de Kathryn Stockett « La Couleur des sentiments » : confidences de Kathryn Stockett© Tate Taylor/ Dream Works II Distribution
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Terrafemina : Kathryn, quelle est la genèse du best-seller « The Help » ?

Kathryn Stockett : Je vivais à New York, en centre-ville, j’avais pris un mois de congé pour écrire. C’est à cette période que j’ai commencé à éprouver une grande nostalgie en pensant à chez moi, au Mississipi. L'une des seules voix que j'avais envie d’entendre était celle de Demetrie, l’employée africaine qui a travaillé pour ma grand-mère pendant 32 ans, elle est morte quand j’avais 16 ans. Cela a soulevé en moi un tas de questions que je ne m’étais jamais posées. « A quoi pensait-elle, pendant toutes ces années où elle travaillait pour notre famille ? » Je sais exactement ce que je pensais d’elle, et elle savait tout de nous, mais j’étais tellement naïve et timide que je n’ai jamais osé lui demander à quoi ressemblait sa vie. J’ai essayé de trouver ces réponses en écrivant, en faisant entendre sa voix dans ces pages.

TF : Vous êtes née et avez grandi à Jackson, dans le Mississipi, comme vos héroïnes. Jusqu’à quel point vos souvenirs ont-ils contribué à cette histoire ?

K. S. : Je me dois de bien souligner que ce livre est une fiction. Je l’ai créé de toute pièce, mais comme je suis originaire du Mississipi, je n’ai pas pu m’empêcher d’y introduire des détails de ma vie, comme la boîte de Crisco ou le poulet frit, la chaleur, l’architecture des maisons avec ces grands porches. Ces lieux où j’étais tous les jours, cet environnement que j'aime. C'est une grande histoire d'amour entre le Mississipi et moi.

TF : Tate, comment avez-vous découvert le roman de Kathryn ?

Tate Taylor : Nous sommes amis depuis l’âge de 5 ans, et je savais qu’elle était en train d’écrire un roman. Elle m’a permis de le lire, et je me suis immédiatement senti très proche de cette histoire entre Aibileen et la petite Mae Mobley, cette relation entre la bonne et la petite fille dont elle doit s’occuper, parce que j’ai été élevé de cette façon. Ma mère était seule et elle devait gagner sa vie pour nous nourrir, quand elle était au travail, Carol Lee s’occupait de moi. C’était une très belle relation, comme tous les liens qui se créent entre les enfants et leur nounou. Je n’avais jamais vu cela à l’écran et même dans un livre de façon si étoffée, j’ai voulu raconter cette histoire.

TF : Comment avez-vous collaboré pour raccourcir le livre – qui compte plus de 500 pages- et en faire un scénario ?

K. S. : Nous avons choisi la solution la plus simple. J'ai écrit le livre, et ai confié le contrat à Tate pour qu’il écrive le scénario et réalise le film. Je ne suis pas intervenue, je le connais trop bien pour me mêler de ce qu’il fait mieux que moi !
T. T. : C’est vrai, je n’arrivais même pas à lui en parler. Elle me répondait que son boulot était terminé, qu’elle écrivait déjà autre chose : « débrouille-toi et bonne chance ! » (rires). Mais ça a été difficile de raccourcir en effet. Ma première version du scénario faisait deux cent pages. Kathryn a écrit un livre génial, et tout ce qu’il y a dedans, on a envie de le garder, mais c’est impossible. J’ai donc dû élaborer mon propre système pour extraire certains éléments.

TF : Comment avez-vous procédé pour le casting ?

K. S. : Tate m’a laissée regarder le casting, et quand il a su qu’il voulait prendre Emma Stone pour le rôle de Skeeter, il nous a invitées à dîner pour que je la rencontre. Je considérais que je n’avais pas à m’immiscer, mais j’étais très heureuse de pouvoir la rencontrer. Pour Octavia Spencer, qui est une connaissance proche de Tate, nous savions qu’elle devait jouer le rôle de Minny Jackson.
T. T. : Je pense que Celia Foote était le personnage le plus difficile à trouver. C’est Jessica Chastain qui a été choisie. C’est un rôle piège, si vous le jouez de la mauvaise façon elle devient une espèce de stéréotype de Marilyn Monroe. C’était vraiment difficile de trouver la bonne actrice, elles n’avaient pas le petit truc en plus qu’a apporté Jessica Chastain, dans le phrasé et les attitudes.

TF : C’est une histoire de femmes et un casting presque exclusivement féminin. Vous ne vous êtes pas senti seul sur le tournage ?

T. T. : Les femmes sont merveilleuses ! (rires) J’adore les personnages féminins. A chaque fois que j’ai eu à composer un personnage masculin j’ai toujours fini par penser qu’il était plus intéressant d’en faire une femme, cela le rendait dix fois plus riche. Je le pense vraiment !

« La Couleur des sentiments », titre original « The Help », de Kathryn Stockett, traduction française Pierre Girard, éditions Actes Sud.
« La Couleur des sentiments », adaptation et réalisation de Tate Taylor, en salles le 26 octobre.

Bande-Annonce :


Extrait :


Crédit photo : Tate Taylor/ Dream Works II Distribution

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