Si la légende urbaine veut qu'un homme enrhumé se transforme illico en petite créature ultrasensible, une récente étude menée au sein de l'Université Rutgers aux États-Unis tend finalement à prouver que ces messieurs auraient plutôt tendance à se montrer plus forts qu'ils ne le sont vraiment face à la maladie. Diana Sanchez, professeure agrégée de psychologie, et Mary Himmelstein, doctorante, se sont ainsi demandé pourquoi les hommes avaient une espérance de vie en moyenne plus courte de 5 ans que celle des femmes. Et la réponse est un miroir de notre société. En effet, selon elles, les raisons ne seraient pas physiologiques mais lorgneraient plutôt du côté des stéréotypes de genre et du conditionnement social.
Les travaux menés par les deux chercheuses montrent en effet que les hommes qui ont une vision très traditionnelle de la masculinité (force physique, courage, absence d'émotions, contrôle de soi) vont plus facilement minimiser leurs symptômes lors d'un rendez-vous chez le médecin. Mais en ignorant leurs problèmes de santé, ces mêmes hommes repoussent l'échéance d'un bon diagnostic et peuvent donc aggraver leur cas.
Pour leur étude, Diana Sanchez et Mary Himmelstein ont d'abord sélectionné 250 hommes. Elles les ont questionné sur leur opinion en matière de virilité, puis leur ont demandé s'ils étaient plus à l'aise avec un médecin femme ou homme. Résultat (pas franchement étonnant) : plus les participants avaient des convictions très stéréotypées plus ils avaient tendance à choisir un praticien de sexe masculin et à estimer que leurs collègues féminines étaient moins compétentes. Pour la deuxième phase de test, les scientifiques se sont intéressées à 250 étudiants de leur campus. Ces derniers ont été soumis au même questionnaire puis ont été interrogés sur leur état de santé, tantôt par des médecins hommes tantôt par des médecins femmes.
Les chercheuses se sont alors rendu compte que plus les étudiants avaient obtenu un score élevé au questionnaire sur la virilité, plus ils allaient cacher leurs symptômes au praticien si celui-ci était un homme. Pour Diana Sanchez, c'est encore une fois le conditionnement social qui rentre en compte : "S'ils ne sont pas francs, c'est parce qu'ils ne veulent pas montrer de signe de faiblesse devant un autre homme ou se montrer dépendant de lui". Enfin – et c'est encore une fois peu étonnant –, les mêmes participants avaient finalement plus de facilité à se confier quand ils se retrouvaient face à des médecins femmes. En d'autres termes, les hommes communiquent mieux avec ces dernières parce qu'ils n'ont pas l'impression d'être jugés mais leur vision quelque peu désuète de la virilité continue de les pousser dans les cabinets tenus par des praticiens de sexe masculin.
En 2014, les deux scientifiques avaient mené une étude similaire publiée dans le Journal of Health Psychology. Elles y révélaient notamment que les hommes ayant une vision très stéréotypée de la masculinité avaient tendance à minimiser leurs symptômes. Par conséquent, ils avaient de moins bons résultats à leurs examens médicaux que les patients – masculins comme féminins - qui partageaient une opinion plus moderne de la place de l'homme et de la femme dans notre société. Ou quand les stéréotype font plus de mal encore qu'on ne pourrait le penser.