Outre le très marketé Nymphomaniac de Lars Von Trier, qui fait de l'ombre aux autres films, il y a également Thanks For Sharing, où la chanteuse Pink, Gwyneth Paltrow, Tim Robbins et Mark Ruffalo, évoluent autour d'un centre pour addicts sexuels (la date de sortie en France n'est pas encore annoncée), Don Jon, avec Joseph Gordon-Levitt, Scarlett Johansson et Julian Moore, où un Don Juan contemporain spectateur compulsif de films porno rencontre une belle blonde qui croit aux contes de fées et bientôt Lovelace (avec Amanda Seyfried, Sharon Stone, Chloë Sevigny …), l'histoire de l'actrice porno Linda Lovelace qui a marqué de son empreinte les années 70 avec Gorge Profonde, un film culte du cinéma adulte. Sous le contrôle de son mari elle devient une star, dans la soumission absolue. Si on ajoute à cela que le Festival de Cannes a souhaité récompenser La Vie d'Adèle, où les scènes de sexe entre femmes sont longues (à défaut d'être crédibles ou excitantes), on est en droit de s'interroger pour savoir si, à la suite de la manne ouverte par la publicité avec le porno-chic (qui s'est révélée aussi lucrative qu'efficace), l'industrie du cinéma ne prendrait pas la relève avec pour but d'apporter aux spectateurs ce qu'ils ne trouvent pas dans le film X : l'autorisation de voir un cinéma qui chatouille leur libido sans porter le poids de la culpabilité, avec des scènes qui, conçues autour d'une trame fictionnelle plus épaisse que dans les films X, ont pour elles une esthétique plus sophistiquée.
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Avec ce vent nouveau de tolérance – le cinéma Hollywoodien est adepte du consensuel – on était en droit de penser que le cinéma trouverait à faire de la fiction où les rapports sexuels seraient une source d'épanouissement pour la femme comme c'est admis pour l'homme, mais hélas il semble que pour elle la chair est irrémédiablement triste. La preuve dans l'ordre : dans Nymphomaniac, l'héroïne ne choisit même pas de devenir nymphomane, elle y est poussée par son amie (on passe outre le titre du film, qui sous-entend que la femme qui a des pulsions sexuelles fortes a un « comportement déréglé » qui s'explique par des raisons psychiques ou physiques) et ne semble pas jouir de ses rapports. Dans Thanks For Sharing, on toucherait presque au sublime puisque au moins femmes et hommes sont addicts sans distinction de genres. Dans Don Jon, le pitch est un retour à la case départ des stéréotypes : l'homme aime le sexe et la femme – blonde – aime les sentiments. Avec Lovelace, c'est l'histoire de la soumission féminine : l'épouse y est dominée par son mari, y compris dans la façon de commercer son corps.
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L'influence de la pornographie dépasse ces apparences, au-delà d'enrober le genre adulte d'acceptabilité, ce cinéma reproduit aussi un vieux schéma du porno : faire des films pour hommes, réalisés par des hommes, avec des fantasmes d'hommes où la femme est encore et toujours l'objet docile de la libido masculine.
Il va donc falloir attendre que les réalisatrices accélèrent massivement le nombre de films adultes qu'elles réalisent, pour que les scénaristes de fiction aient à puiser dans un registre différent, multiple, riche, épanoui et que les hommes dans leur ensemble exultent à l'idée que les femmes aussi aiment le sexe, au lieu de le redouter.
L'année démarre fort, les deux genres pourraient se réconcilier sur l'oreiller...