Diplômée de Sciences Po, économiste très érudite en ce qui concerne les politiques budgétaires, ancienne enseignante et ex soutien de Martine Aubry, aussi bien passée par le cabinet d'Anne Hidalgo que par le Trésor public, Lucie Castets est pour beaucoup, aux côtés de figures comme l'écologiste Marine Tondelier, un nouvel espoir de la gauche.
D'ailleurs, la haute fonctionnaire candidate au poste de Premier ministre en tant que représentante du Nouveau Front Populaire, parti victorieux des élections législatives. Mais hormis son parcours témoignant de fonctions administratives diverses, d'engagement auprès de la gauche depuis quinze ans, et de prises de position en cohésion avec le "NFP", comme le report de la réforme des retraites, que sait-on au juste de Lucie Castets ?
Afin d'éclaircir cette interrogation, la principale concernée a choisi de se dévoiler elle-même dans les pages de Paris Match... Et cela a pris la forme d'un coming out, aussi subtil qu'évident. Et tout sauf anodin dans un pays où la lesbophobie règne. En France d'ailleurs, seulement 37 % des lesbiennes ont fait leur coming out au travail, contre la moitié des hommes gays, comme l'a relaté un rapport détaillé de Sos Homophobie. Raison de plus pour écouter Lucie Castets.
On la lit.
Effectivement, en abordant sa vie intime et politique auprès du magazine, Lucie Castets a décidé de dévoiler la réalité de ses relations : elle est actuellement en couple avec une femme et toutes deux sont mères d'un enfant de deux ans et demi. Un équilibre familial qu'elle espère préserver malgré une médiatisation très accrue. "Lucie Castets maintient la pression, multipliant les déplacements et les apparitions médiatiques, plus ou moins maîtrisées", observe d'ailleurs à ce titre Paris Match.
"Je souhaite trouver un équilibre entre protéger ma famille, ma femme et notre enfant, et dire qui je suis. Ça me semble encore important aujourd’hui", a-t-elle ainsi affirmé. "Je veux dire qui je suis".
C'est un témoignage qui n'a l'air de rien mais qui comme bien des coming out est un geste de courage et d'affirmation de soi. Il suffit d'observer les réactions suscitées par l'élue et militante lesbienne Alice Coffin pour constater la virulence de la lesbophobie non seulement dans le champ politique, mais dans la société française en général.
En 2021, la maire écologiste du 12e arrondissement de Paris Emmanuelle Pierre-Marie avait également révélé sur ses réseaux sociaux les extraits d'une lettre qu'elle avait reçue, et dont l'intention ne brille guère par son ambivalence : "Avec la tronche que vous avez c'est sûr que les mecs vont pas se bousculer au portillon pour vous tringler. Mais foutez nous la paix, broutez vous le minou et fermez vos gueules. Salut les gouines !".
La réalité de ces violences largement banalisées nous rappelle que le coming out ne doit pas cesser d'être un sujet. On balaie trop souvent cette "révélation" par le biais d'un insouciant "on s'en fiche !" sans prendre conscience de l'importance de se dire lesbienne, ou homosexuel.
"Les femmes lesbiennes souffrent à la fois d'une condamnation homophobe de base, et d'une silenciation sexiste. Ces deux choses assemblées, être lesbienne devient carrément un non-sujet", déplore à ce titre Louise Morel, l'autrice du très intéressant manuel Comment devenir lesbienne. Qu'est-ce que le désintérêt pour le coming out, si ce n'est la démonstration d'un privilège hétérosexuel ? C'est en tout cas ce que suggère en partie la très incarnée enquête Le génie lesbien, qui met en mots l'importance de donner d'être visible.
Alice Coffin, pour Terrafemina : "Ce refus de voir l'orientation sexuelle c'est un problème massif en France".
"Car cet aveuglement ne sert personne : comment dénoncer et combattre les problématiques si on refuse de les voir et de les nommer ? C'est ne pas reconnaître qu'elles existent sous couvert d'un "on s'en fout". Il y a un déni général. Et qui, dans le cas de la question lesbienne, s'exprime à travers la réception de mon livre. C'est comme si les médias ne souhaitaient même pas commencer à en parler"
"J'entends qu'au sein du militantisme, on préfère le mot "queer" qui a une vraie portée politique également. Il permet de se situer d'une manière différente. Le mot "lesbienne" a en lui une autre résonance et met en panique les hommes. Il est davantage interprété comme un défi au masculin. Et ça, ça m'intéresse ! Le rejet de ce mot en dit long sur sa force"