Le sexisme dans les grandes écoles reste tenace. Comme une tache que l'on n'arrive pas à enlever, malgré une plus grande ouverture au recrutement des femmes depuis plusieurs années. Cette fois-ci, ce sont des élèves de l'EM Lyon qui sont épinglés. Révélée par le Progrès et Lyon Capitale, l'histoire est consternante.
Sur un groupe Facebook privé appelé "Mur pipos 2k17" (le mot pipos faisant référence "à la verge masculine") et ouvert depuis juin 2017 seulement aux étudiants mais pas aux étudiantes, les participants ont commenté et noté leurs camarades féminines en fonction de leur apparence physique, leurs yeux, les sourcils ou la bouche. Les notes allaient jusqu'à 20 pour 450 filles âgées de 17 à 23 ans et donc pour certaines mineures.
La journaliste du Progrès a relevé des propos "vulgaire et injurieux, ainsi qu'[un] vocabulaire emprunté au IIIe Reich." Elle cite quelques exemple comme "fausse blonde surmaquillée", "cavalière cherchant sa monture", "créature de Frankenstein", "Bimbo maquée", "Faut de la bonne tuyauterie", "à utiliser en besoin de branlette espagnole" ou "à pervertir". Des propos humiliants écrits par des garçons, futurs managers dans des entreprises, qui se sont sentis tout permis.
Mais les étudiants ne s'en sont pas arrêtés là. Dans un document Excel, ils ont recensé les données personnelles des étudiantes dans des colonnes aux noms plus que douteux comme "pédophile" pour la colonne des années de naissance, ou "send nudes" (envoie des nues) pour la colonne adresses mails, et une colonne stalking (traque en français) avec les adresses des profils Facebook de jeunes filles pour certaines mineures. Le Progrès raconte que ces informations sur les étudiantes ont été récupérées par les étudiants chargés de l'accueil, "ce qui signifierait un détournement de données privées".
Selon les journalistes ayant révélé l'affaire, les associations étudiantes étaient au courant ainsi que de nombreuses et nombreux étudiant·e·s. Ce fichier était semble-t-il une "tradition". Ils et elles auraient eu peur d'en parler de peur d'entacher la réputation de l'école qu'ils et elles paient très cher tous les ans.
Alors non, ça n'est pas une blague potache, encore une fois, cette histoire est grave et est un bel exemple de sexisme et de culture du viol. En donnant les coordonnées personnelles des étudiantes et en incitant les étudiants à envoyer des photos, à aucun moment le consentement de leur camarade n'est demandé.
Le directeur général de l'école, Bernard Belletante, assure au Progrès ne pas avoir eu vent de ce groupe Facebook et de ce tableau Excel. Dans une lettre publiée sur le site internet le 2 août, il a annoncé l'ouverture d'une enquête à partir du 20 août prochain "afin de connaître toutes les composantes de ce manquement à l'éthique." Il parle de "comportement illégal et contraire à notre règlement intérieur." Il ajoute : "Les étudiants, dont l'implication serait confirmée, seront convoqués en conseil de discipline. Je rappelle qu'à deux reprises en deux ans, les membres du conseil de discipline ont prononcé des exclusions pour des dérapages de cette nature."
On attend maintenant de voir les mesures qui seront décidées à la fin de l'enquête.