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Sexualité : tout savoir sur le point G
Publié le 24 mars 2011 à 15:00
Par Marine Deffrennes
Jamais personne n’avait eu l’idée de faire une échographie du clitoris. Objet indésirable de la faculté de médecine, l’organe du plaisir féminin n’a pourtant pas livré tous ses secrets. Dans « Qui a peur du point G ? », Odile Buisson, gynécologue, signe un manifeste pour une médecine sexuelle féminine. Interview.
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Odile Buisson est gynécologue-obstétricienne, elle exerce à Saint-Germain-en-Laye (78).

Terrafemina : En 2009 et 2010, vous avez réalisé avec le professeur Pierre Foldès, chirurgien, les premières échographies du clitoris. Pourquoi ces examens n’avaient-ils jamais été pratiqués auparavant ?

Odile Buisson : Le clitoris est depuis longtemps négligé par la médecine. Les premières plaintes sont venues des femmes africaines immigrées en France. Au cours de sa carrière dans l’humanitaire, le Dr Foldès s’était beaucoup intéressé aux femmes excisées. C’est à travers la douleur de ces femmes qu’on a identifié cet oubli, un oubli de l’Occident aussi. Jusqu’en 1998, on ne connaissait pas l’anatomie exacte du clitoris. Lorsqu’une femme se blessait, on ne regardait pas à cet endroit, alors qu’on est tout à fait capable de réparer une verge après un accident. C’est un organe délaissé et tabou parce qu’il ne sert à rien d’autre qu’au plaisir des femmes.

TF : Qu’avez-vous découvert ?

O. B. : J’ai découvert qu’on pouvait voir exactement comment était fait le clitoris grâce à l’échographie. Malheureusement, il n’y pas de sonde adaptée pour regarder correctement, mais j’ai tout de même remarqué une chose importante, c’est que le clitoris est mobile. Sous l’impulsion des contractions périnéales, chaque élément bouge. Cela m’a poussée à observer ce qu’il se passait lors d’une pénétration vaginale pour voir si les choses changeaient sur le plan mécanique. J’ai constaté que sous la pression de la verge, le sommet de l’arche du clitoris (partie intérieure du clitoris) fait un mouvement de descente vers la zone vaginale comprimée par la pénétration. J’ai compris que le clitoris était beaucoup plus grand que ce que nous croyons et qu’il jouait sans doute un rôle lors du coït.

TF : Cela peut-il prouver l’existence du point G ?

O. B. : Sur le plan mécanique, il devient tout à fait logique que la partie antérieure du vagin, décrite par de nombreuses femmes comme leur « point G », soit sensible, puisqu’une partie du clitoris se trouve juste derrière lors de la pénétration. Les femmes qui racontent leur jouissance à cet endroit ne sont pas folles. En fait le point G n’est pas un bouton ON/OFF, c’est une fonction due à une interaction entre la verge, le vagin, l’urètre et le clitoris. Mais dans cette mécanique il y a aussi des phénomènes neurologiques et vasculaires qui sont à l’œuvre et qu’il faudrait étudier.

TF : Justement, la médecine sexuelle existe pour les hommes – notamment pour soigner les troubles de l’érection-, mais pas encore pour les femmes, comment l’expliquer ?

O. B. : C’est une injustice criante. On a étudié le pénis sans se poser de questions parce qu’il sert à la reproduction. Mais un homme qui n’a plus d’érection à 60 ans souffre, même s’il ne veut plus d’enfants, et cette souffrance est reconnue et soignée par le Viagra. Pourquoi les femmes n’auraient-elles pas droit au plaisir comme les hommes ? L’absence de satisfaction sexuelle provoque des troubles psychiques et physiques chez certaines femmes, et parfois des ruptures dans le couple. Pourquoi n’étudierait-on pas le clitoris comme le pénis ? Même si l’orgasme féminin est beaucoup plus lié au cerveau que l’orgasme masculin, rien n’empêche de se pencher sur le clitoris pour mieux le connaître, identifier d’éventuelles pathologies et les traiter.

TF : Pensez-vous que la dysfonction sexuelle féminine – le troubles de la libido et de l’orgasme- pourraient trouver une réponse médicale, et pas seulement psychologique ?

O. B. : Il est réducteur de dire que les femmes ne jouissent qu’avec leur cerveau. Tous nos organes fonctionnent et dysfonctionnent, pourquoi pas le clitoris ? Certaines femmes souffrent de douleurs intenses au niveau du clitoris, le Dr Foldès a identifié des névromes, c’est-à-dire de petites lésions dues à des chutes oubliées pendant l’enfance. Aucun médecin à part lui n’est capable d’aider et d’opérer ces femmes. Il suffirait pour explorer ce continent inconnu d’une structure de recherche universitaire, mais la France ne se décide pas à aborder ces questions.

TF : Vous semblez être la première à vous intéresser à ce petit organe féminin. Les féministes auraient-elles démissionné sur ces questions ?

O. B. : Beaucoup de confrères autour de moi ne voyaient pas l’intérêt d’étudier le clitoris. Ils ne voyaient pas à quel point il était sexiste d’étudier le pénis et pas le clitoris. En effet je pense que les féministes du siècle dernier ont laissé cela de côté. Mais aujourd’hui je pense que ce n’est pas le féminisme qui est en cause, mais le partage entre hommes et femmes, parce qu’on jouit mieux quand on est deux à jouir, c’est indéniable.

Odile Buisson avec Pierre Foldès, « Qui a peur du point G ? », éditions Jean-Claude Gawsewitch, 18,90 Euros.

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