Elle se définit comme une "raconteuse d'histoires". Et des histoires, Véronique Gallo en a beaucoup en stock. Que ce soit dans ses petites vidéos Youtube ou sur scène, celle qui a été prof agrégée de français dans une autre vie partage les mille et une anecdotes qui émaillent son quotidien de mère de trois enfants et sa "vraie vie" de quadra divorcée. De la charge mentale à la gestion d'ados, des diktats de la beauté qui oppressent aux parents qui vieillissent, la pétillante humoriste belge décomplexe, déculpabilise et fait (beaucoup) rire.
Alors qu'elle s'installe au Grand Point Virgule, à Paris, jusqu'au 11 mars avec son nouveau spectacle malicieusement intitulé Femme de vie, Véronique Gallo se confie sur son parcours atypique et ses inspirations.
Véronique Gallo : J'ai écrit beaucoup de journaux intimes entre mes 12 et 21 ans et toutes les 5 pages, on retrouve : "Je veux monter sur scène". Je faisais beaucoup de théâtre et pourtant, je n'ai pas osé me lancer. En Belgique, on m'a fait comprendre que c'était à Paris que tout se passait. Puis on a tenté de me décourager en rappelant qu'il y a beaucoup d'appelés et peu d'élus. Mon père était particulièrement fermé au fait que je puisse "faire la saltimbanque", il m'a poussée à faire des études "sérieuses".
J'ai commencé mes études de lettres, je suis tombée follement amoureuse et me suis mariée à 23 ans. J'ai fondé une famille, acheté une maison et une tondeuse. Et c'est comme si j'avais mis mon désir de monter sur scène dans une boîte. Je me suis beaucoup autocensurée, j'ai longtemps eu peur de ce qu'on pourrait dire à moi, la "bonne épouse".
V.G. : Mon père est mort et je suis devenue maman. Et d'un coup, je me suis imaginée grand-mère et ce que je pourrais raconter à mes petits-enfants. Je ne me voyais pas leur dire : "Mamie aurait tellement voulu...". Cela a été une espèce de claque.
J'ai recommencé les stages de théâtre, j'ai suivi des ateliers d'écriture, et j'ai rencontré des gens sur mon chemin qui ont cru en moi, comme mon metteur en scène, Jean Lambert.
V.G. : Non, et heureusement. En revanche, je constate que sur les plateaux d'émissions, il y a 7 hommes pour 3 femmes. Cela m'agace. Comment expliquer cela ? Je dirais qu'un homme peut tout dire, un homme peut tout faire alors qu'une femme, c'est encore vu bizarrement.
V.G. : J'ai eu Muriel Robin. C'est une grande comédienne et elle m'a fait croire que c'était possible.
V.G. : J'ai eu mon premier enfant à 24 ans, mais j'étais prête et je le voulais. J'avais toujours idéalisé la maternité, j'étais persuadée que je serai une mère extraordinaire et que j'adorerais ça. Tout le monde m'avait dit que ce serait formidable- et c'est le cas sur plein d'aspects sinon, je n'aurais pas eu trois enfants. Mais ce n'est pas aussi simple, il y a des jours où c'est même très compliqué. Tout cela m'a donné un terreau pour mon écriture.
V.G. : Oui. J'ai écrit un roman en 2014, Pour quand tu seras grande. Il est assez trash. C'est un roman qui traite du burn-out maternel, de cette difficulté à ne plus trouver le souffle, d'avoir peur de rentrer à la maison, de la charge mentale... Je pense que j'ai fait une dépression post-partum : j'étais persuadée que cela allait être fantastique et je me suis retrouvée avec un bébé qui a hurlé les cinq premiers mois.... Et j'ai fini par douter de mes capacités. J'ai tout de suite été voir une psychologue, j'ai été très bien accompagnée et j'ai réussi à accepter, à dédramatiser.
Ce livre, je ne l'ai sorti qu'en 2020, j'ai attendu le bon moment. J'ai d'abord voulu essayé de rire de tout cela. Et c'est pour cela que j'ai sorti Vie de mère avant, qui traite de la maternité à travers le prisme de l'humour.
V.G. : Les enfants en général, mais pas mes enfants. "Clochette", "Bouddha" et "Moïse", les enfants de mes vidéos, ne sont pas mes enfants, même si je les adore. Ils sont le fruit de mon imagination, ce sont des archétypes. Tout comme dans Vie de mère, "Bertrand" incarnait tous les hommes. Il y a de l'universel en nous.
Ma priorité, c'est de ne pas trop mêler mes enfants à tout cela. Ma plus petite de 9 ans et demi s'interroge beaucoup là-dessus, sur ce qui est vrai et ce qui est faux dans mes sketches. Je tente de la rassurer régulièrement.
V.G. : Bien sûr et c'est très inspirant car cela permet d'aller contre. Il y a par exemple le fait que l'on ait à se sacrifier pour ses enfants. Nous, les femmes, quand on s'absente, tout le monde s'inquiète. Par contre, lorsqu'un homme part pour le boulot quelques jours, personne ne se pose de questions. Je me suis déjà retrouvée à préparer des plats à l'avance lorsque je partais deux jours. Je pensais que c'était normal...
V.G. : Le déclic est passé par l'écriture. Mes spectacles sont un kaléidoscope de ma vision du couple, de la femme, de la vie de famille, de la "vraie vie". Mon premier spectacle, On ne me l'avait pas dit, racontait l'histoire d'une femme qui pensait vivre La petite maison dans la prairie avec Charles Ingalls et réalise qu'elle vit dans Dallas. Ecrire, cela permet d'ouvrir des portes.
V.G. : Oui, je trouve que c'est un âge extraordinaire : on sait qui l'on est, on sait ce que l'on veut, ce qu'on ne veut plus. Je trouve cela très joyeux et très agréable. Le corps qui commence à se déglinguer, par contre, c'est un peu moins drôle. Mais il vaut mieux en rire. C'est ce que j'ai choisi de faire.
V.G. : Cela permet en tout cas de prendre de la hauteur. Et c'est un bon moyen de communiquer entre nous. Lorsque j'entends une salle qui rit, je trouve ça chouette. Quand je me retrouve face à un miroir et que je me trouve grosse, je pense à toutes ces femmes qui riaient avec moi. Je pense que les hommes vivent ça aussi, même s'ils en parlent moins.
Véronique Gallo
Spectacle Femme de vie
Informations et réservations ici
Grand Point Virgule à Paris jusqu'au 11 mars 2023
Terrafemina est partenaire du spectacle.