Dans l'imaginaire collectif, un violeur s'apparente souvent à la silhouette menaçante d'un inconnu dans une ruelle sombre et déserte. C'est pourtant une vision erronée : dans 8 cas sur 10, l'auteur du viol est un proche de la victime.
C'est ce que veut rappeler le Collectif féministe contre le viol (CFCV) dans une nouvelle campagne télévisée qui sera diffusée à partir du 27 janvier sur une douzaine de chaînes. Présenté mardi à la presse, le spot télévisé d'une trentaine de secondes et réalisé par l'agence New BBDO fait froid dans le dos. On y suit l'arrivée de Marc dans une soirée entre amis. « Pour Mathilde et Jean, Marc est leur meilleur ami, il a même été témoin à leur mariage. Pour Nora, c'est le mec le plus drôle qu'elle connaisse. Pour Éric, c'est le pote sur qui on peut toujours compter », commente une jeune femme présente à la soirée. Avant de lâcher, au moment où Marc l'embrasse sur la joue : « Pour moi, c'est celui qui m'a violée. » « Dans huit cas sur dix, l'auteur du viol fait partie de l'entourage », conclut le clip.
Inciter les victimes de violences sexuelles à libérer la parole, et à porter plainte contre leur agresseur : c'est la volonté du CFCV, qui rappelle dans son dossier de presse que dans 86% des cas, les victimes connaissent leur violeur. « Cela peut se dérouler à la maison, au travail, dans le cercle d'amis… C'est ce qui va rendre difficile le fait d'en parler. Quand cela surgit dans le cercle des proches, cela remet en question toutes les autres relations. Certains voient cette personne comme un copain et non pas comme un violeur », explique à Elle Emmanuelle Piet, présidente de CFCV.
D'où l'importance de cette campagne, qui souhaite « montrer à quel point il est important pour une victime de pouvoir parler, de pouvoir être aidée et accompagnée, estime le Dr Gilles Lazimi, coordinateur des campagnes du CFCV. Pour aider ces personnes à se reconstruire, il faut qu'on les reconnaisse comme victimes. » Il faut « faire changer la honte de camp » en montrant aux femmes victimes de viol la stratégie de leur agresseur et en les aidant à se déculpabiliser.
Car, insiste Emmanuelle Piet, c'est seulement en brisant le silence que les victimes de viol pourront mettre un terme à l'omerta qui profite à leur agresseur. « La femme victime d'un viol n'est jamais responsable. Elle a besoin qu'on lui dise que le seul coupable et responsable est l'auteur des faits, qu'elle n'y est pour rien et qu'on peut l'aider », rappelle-t-elle.
Selon les données recueillies par la Mission interministérielle pour la protection des Femmes victimes de violences et la lutte contre la traite des êtres humains (MIPROF), 86 000 femmes subissent chaque année un viol ou une tentative de viol. Pourtant, seules 13% des victimes portent plainte et 1% des plaintes conduisent à une condamnation. La honte, la peur d'être jugée par leur entourage ou de ne pouvoir supporter une procédure juridique longue sont autant de facteurs qui conduisent les femmes à ne pas porter plainte.
Pour les accompagner dans leurs démarches et les écouter, le CFPV met à disposition des femmes victimes de violences sexuelles une ligne d'écoute nationale, ouverte du lundi au vendredi de 10 heures à 19 heures et gratuite depuis un poste fixe : Viols-Femmes-Informations 0 800 05 95 95.
>> Je suis à l'heure : le court-métrage choc qui dénonce notre lâcheté face au viol <<