30% des gros succès de 2023 seulement proposaient des persos féminins en tête d'affiche (selon le rapport de l’initiative Annenberg Inclusion), mais fort heureusement, Greta Gerwig était là. Avec ses 1,38 milliard de dollars au box office US, son très mordant Barbie a fait office de colossal succès et plus encore, de véritable phénomène culturel.
Nous devons donc le film le plus rentable de l'année 2023 à celle qui peut également se targuer d'être devenue l'an dernier la deuxième cinéaste présidente du Festival de Cannes... en 77 ans d'existence. Avant Greta Gerwig, Jane Campion (La leçon de piano) eut l'honneur de présider le prestigieux événement, mais c'est à peu près tout. Et si la réalisatrice est toujours méprisée par l'Académie des Oscars, cela ne l'empêche pas d'avoir de la suite dans les idées. Littéralement !
Car le hit Barbie aidant, Gerwig pourrait tout à fait envisager de dédier un film entier... A Ken. Rôle pour lequel son interprète, Ryan Gosling, avait obtenu un Critic Choice Award, récompensant sa chanson éponyme - "I'm Ken". Ken il faut le dire occupait une place envahissante dans la comédie de Gerwig. Mais faut-il pour autant lui accorder un spin off ?
C'est peut être la meilleure des fausses bonnes idées...
C'est auprès de l’émission 60 Minutes que la réalisatrice - dont nous recommandons l'excellent premier film, Lady Bird, relecture féministe d'un genre hyper stéréotypé - a suggéré la possibilité d'un film Ken. Projet qui impliquerait carrément le même co-scénariste, son propre conjoint, le réalisateur et auteur (pour Wes Anderson notamment) Noah Baumbach. Baumbach, qui a offert à Gerwig l'un de ses rôles - en tant qu'actrice - les plus emblématique avec Frances Ha, son hommage à la Nouvelle Vague.
"On verra bien. On a encore beaucoup de matière sur Ken", a déclaré Gerwig.
C'est cohérent. Car Ken est, quelque part, le coeur de Barbie.
Objet pop-féministe acidulé, cette satire aborde sans détour la masculinité et à travers elle les mécanismes du patriarcat. Système joliment taquiné et dont le bellâtre incarné par un Ryan Gosling tout en autodérision va devenir la personnification au fil de l'évolution de son écriture et surtout, de sa découverte du monde réel - une version légèrement cartoonesque du nôtre.
Il semblerait que Baumbach et Gerwig aient mis beaucoup dans ce personnage, synthèse de leurs réflexions et de leurs fantaisies burlesques. Un spin off ne serait pas forcément absurde.
Greta Gerwig, au magazine de cinéma Première : "Ken est un personnage hilarant. C'est un peu la Genèse à l’envers : Barbie a été créée en première, puis Ken a été créé pour être son compagnon, ou son accessoire. Ken est le petit ami de Barbie, il n’a aucune signification en dehors de ça, elle est sa raison d’être"
"Dans le monde de Barbie tout est inversé. Ken n’a pas de pouvoir, pas d’argent, pas de maison, pas de voiture. On ne sait même pas où il passe la nuit. C’est une figure tragique et hilarante. C’est presque shakespearien. C’est un homme qui joue une femme qui joue un homme. A un moment donné, tu ne sais plus qui tu soutiens, tout est délicieusement chamboulé. Ca permet d’explorer les choses sans que ça ressemble à une leçon"