"Je gère ça toute seule puisqu'aucun autre tatoueur ne semble intéressé" glisse Flavia Carvalho au Huffington Post Brazil . Depuis deux ans, cette tatoueuse brésilienne gère le projet The Skin of a Flower dont le but est à la fois simple mais très important : recouvrir de tatouages les cicatrices de femmes victimes de violences conjugales ou ayant subi des agressions physiques. Flavia tatoue les victimes gratuitement et explique que le "seul investissement demandé à ses clientes est le choix du motif". Blessures à l'arme blanche ou blessures par balle, cicatrice sur l'abdomen, sur les jambes ou les bras, rien ne résiste à la Brésilienne qui ne souhaite qu'une seule chose, offrir aux victimes des tatouages "qui peuvent les aider à s'émanciper de la violence et qui peuvent booster leur estime de soi".
D'abord monté dans la discrétion, le projet de Flavia Carvalho a peu à peu grossi au point d'attirer l'attention des médias. Si la jeune femme se dit sous le choc, il est pourtant facile de comprendre pourquoi ses tatouages libérateurs font le buzz. Au Brésil, les violences physiques envers les femmes sont un véritable fléau. Ainsi, une femme est agressée toutes les 15 secondes à Sao Paulo, tandis qu'une femme est assassinée toute les deux heures dans le pays. 65% des violences physiques se dérouleraient au sein du foyer et d'après les statistiques (glaçantes), plus de 92 000 femmes seraient mortes au Brésil sous les coups de leur conjoint au cours des trois dernières décennies. Au final, le plus grand Etat d'Amérique latine arrive septième dans le classement des pays les plus dangereux pour les femmes.
La relation entre la tatoueuse et les victimes de violences physiques a commencé il y a deux ans lorsqu'une cliente lui a demandé de recouvrir une large cicatrice sur son abdomen. "Elle m'a raconté qu'elle avait été poignardé dans une boîte de nuit. Quand elle s'est retournée, un homme s'est approché et l'a poignardé avec une lame rétractable. Quand elle a vu le tatouage terminé, elle était très émue et cela m'a beaucoup touchée", explique Flavia Carvalho au Huffington Post.
Depuis cette rencontre, les demandes n'ont pas cessé d'affluer et le retour des victimes est plus que jamais positif : "Il s'est créé entre nous une sorte d'affection, une fraternité, et une camaraderie plus profonde que je n'aurais pu imaginer. Je reçois des demandes de tout le pays et même de l'étranger. Elles viennent au studio, elles racontent leurs histoires de peine et de résilience, et elles me montrent leurs cicatrices. Elles sont embarrassées, alors elles pleurent et elles me prennent dans leurs bras. Puis on s'occupe du motif et on prend rendez-vous pour le tatouage. Alors elles deviennent excitées et optimistes. C'est merveilleux de voir leur relation avec leur corps changer grâce au tatouage. Je suis amie avec pas mal d'entre elles sur Facebook et je vois bien qu'après avoir eu honte de leurs cicatrices, elles sont maintenant fières de poster des photos d'elles en robes. Elles ont l'air heureuses, changées. C'est une transformation".
Si Flavia Carvalho estime que son projet n'est "qu'un grain de sable", elle fait tout pour lui faire prendre de l'ampleur. La tatoueuse basée à Curitiba s'est associée au secrétariat municipal des polices pour les femmes pour entrer plus rapidement en contact avec des victimes de violences. Parce qu'elle tatoue également des femmes ayant subi des mastectomies, elle participera cette année à l'évènement Octobre rose en partenariat avec un hôpital de sa région.