Les tâches ménagères d'aujourd'hui forgent-elles les adultes de demain ? C'est en tout cas ce que laisse à penser une étude américaine de 2002, récemment exhumée par Le Monde. En effet, selon la chercheuse Marty Rossmann, la participation des enfants à des tâches domestiques à l'âge de 3 ou 4 ans serait le critère le plus pertinent pour déterminer leur réussite future.
En clair, outre une bonne éducation et un QI correct, passer l'aspirateur, entre autres, influerait sur la socialisation, la réussite scolaire ou encore l'indépendance économique. Pour démontrer cette assertion, la chercheuse américaine a exploité les données d'une étude conduite auprès de 84 enfants à partir de 3-4 ans, puis à 9-10 ans, 15-16 ans et enfin dix ans plus tard.
Les bienfaits de ce qui est communément appelé les corvées seraient nombreux dans la construction de l'enfant. Elles favoriseraient l'accès à l'autonomie des petits, développeraient leur confiance et leur altruisme. Reste que, comme l'indique Guillemette Faure dans M, "en France, les jeunes de 11 à 25 bas qui vivent chez leurs parents en font peu, 8 heures par semaine, soit trois fois moins que leurs parents", d'après l'Insee.
Un manque de participation auquel s'ajoute une inégalité au sein même des couples puisque même si en 25 ans l'écart de temps passé aux tâches domestiques s'est réduit de 40% entre les femmes et les hommes, plus les tâches sont considérés comme des corvées, moins les hommes s'y impliqueraient selon une étude de l'Insee conduite en 2012. Ainsi, seulement 14% des hommes s'occupent du repassage, contre 66% des femmes. Les inégalités vont même en grandissant au fur et à mesure que le nombre d'enfants dans le foyer augmente.
Faire participer les enfants aux tâches domestiques a donc également le mérite de participer à la lutte contre la reproduction des inégalités entre générations. Dès 2 ou 3 ans, les petits peuvent donc déjà commencer à se brosser les dents avec de l'aide, ouvrir le robinet pour remplir un verre, se laver les mains ou encore ranger leurs jouets avec de l'aide. A 6 ans, passer une éponge sur une table, mettre son assiette dans le lave-vaisselle, et vers 12 ans, tondre la pelouse, par exemple.
Autant de tâches qui disent à l'enfant : "Je t'aime suffisamment pour t'apprendre à te passer de moi, pour te vouloir autonome", explique Brigitte Racine, infirmière et psychothérapeute. Et de conclure en voyant en ces tâches une preuve "d'amour et de confiance".