
"Certains films marquent nos esprits. D’autres marquent nos âmes"
C'est sous cette annonce prometteuse que l'instigatrice de l'excellent compte Instagram Ecrits de Femmes, plume féministe riche en prescriptions, déploie un passionnant récap' : le classement Letterbox des meilleurs films réalisés par des femmes. Letterbox est une application de notation de films, mais également un réseau social réunissant les amoureux de cinéma.
Et que trouve-t-on sur le podium de ses abonnés ?

Et bien, cocorico, un chef d'oeuvre du cinéma hexagonal : Portrait de la jeune fille en feu de Céline Sciamma. Meilleur film de son autrice, auréolé de la sidérante photographie de Claire Mathon (sacrée par un César), cette idylle entre une peintre et son modèle (Noémie Merlant et Adèle Haenel, fusionnelles) s'amuse des attentes du public en réinventant la mise en scène du désir.
C'est sensuel, visuellement sublime, poétique...
Et ce n'est que l'un des visages de tout un panorama cinématographique, fourmillant de propositions filmiques audacieuses, très incarnées, avant-gardistes... Suivez le guide.

Que trouve-t-on suite à Portrait de la jeune fille en feu ?
Ecrits de femmes dévoile le reste des oeuvres de femmes cinéastes les mieux notées sur la Toile : Persepolis, le long métrage d'animation contestataire de Marjane Satrapi (co réalisé par Vincent Paronnaud), voix emblématique portant l'envie de liberté des citoyennes iraniennes, Mustang de Deniz Gamze Ergüven, portrait multiple de cinq soeurs en quête d'émancipation (comparé au The Virgin Suicides de Sofia Coppola) mais aussi Meshes of the Afternoon de Maya Deren (co réalisé par Alexander Hammid), oeuvre beaucoup plus méconnue mais non moins captivante.
Mais ce n'est pas tout. Car le meilleur film au monde est réalisé par une femme.

A savoir ?
L'oeuvre que la prestigieuse revue Sight & Sound sacre donc - après conciliation entre critiques cinéma à l'international - au plus haut des films de l'histoire du cinéma, devant Vertigo d'Alfred Hitchcok et Citizen Kane d'Orson Welles : Jeanne Dielman, 23, quai du commerce, 1080 Bruxelles de la grande cinéaste belge, lesbienne et féministe Chantal Akerman.

C'est le récit quasi documentaire, en plans séquences, d'une femme au foyer embourbée dans l'ennui. Trois heures de naturalisme qui s'exercent à saisir, avec un art du cadrage admirable, la condition féminine, cloisonnée entre quatre murs. Et ce, sous l'incarnation d'une actrice légendaire : Delphine Seyrig, que les fans de Peau d'âne connaissent bien.
Beaucoup voient là une pierre angulaire du cinéma féministe.



Jeanne Dielman, que la BBC avait déjà érigé sur le podium de son classement.

C'est ce que rapporte Allociné, en détaillant le reste du classement des films édifié par le média britannique de référence. Lost in Translation, de Sofia Coppola, Cléo de 5 à 7, d'Agnès Varda, Démineurs, de Kathryn Bigelow, et en première place, un autre classique : La leçon de piano de Jane Campion.
Personne n'est vraiment ressorti indemne de ce mélodrame qui témoigne de la sensibilité de la réalisatrice australienne, mais aussi de sa propension à concilier cruauté, confusion des sentiments, densité romanesque et... Ce que la critique cinéma Iris Brey explore à travers son essai, Le regard féminin : une complexité du point de vue, au plus près de l'expérience féminine.
Le reste du Top érigé par la BBC ne manque pas de piquant. On vous recommande fortement les plus méconnus : Toni Erdmann, de Maren Ade, Wanda, de Barbara Loden (film préféré de Pamela Anderson !), Fish Tank, de Andrea Arnold.




Riche en recos également, le classement des meilleurs films réalisés par des femmes, proposé par le média de cinéma IndieWire, source très très sûre outre atlantique pour qui désire se renseigner sur l'actualité cinématographique. Un classement hyper éclectique partagé par la plateforme de notation, et réseau social, Sens Critique.
Vous avez l'embarras du choix. Par exemple...
Une équipe hors du commun de Penny Marshal, film de base ball réjouissant avec Geena Davis qui donne du fil à retordre à Tom Hanks, Lady Bird, admirable relecture féministe d'un genre trop longtemps monopolisé par American Pie et ses succédanés, The Rider, le premier long métrage de Chloé Zhao, Oscarisé pour Nomadland, ou encore Recherche Susan désespérément, film culte pour toute une génération, où excelle un duo badass (Madonna et Rosanna Arquette) et dont la cinéaste, la trop incomprise Susan Seidelman, a récemment eu droit à une rétrospective à la Cinémathèque française.

Un dernier pour la route, qui revient dans toutes les listes : un blockbuster qui a fait date, conciliant cultures (américaine, hong kongaise, japonaise) et médiums (septième art, comic book, jeux vidéo, mangas) avec une exigence et une densité symbolique vertigineuse, film qui inspire toujours, 25 ans plus tard, l'industrie hollywoodienne, et porte aux nues un personnage féminin incroyablement stylé...
Ce film, c'est évidemment Matrix, des soeurs Wachowski.