Santé Publique France et l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) ont révélé les conclusions de leur 6e enquête nationale confidentielle sur les morts maternelles (ENCMM). Une étude qui se penche sur un sujet rarement évoqué, et encore trop tabou : la mort maternelle, ou décès maternel, désignant ainsi la mort d'une femme pendant la grossesse, l'accouchement ou la première année qui suit la naissance. Elle concerne 50 à 100 personnes tous les ans. Entre 2013 et 2015, durée de l'enquête, 267 mères sont décédées.
Au fil de leurs recherches, en collectant de nombreuses données, les deux institutions publiques ont établi la liste des causes principales de ces drames. En premier, les maladies cardiovasculaires, responsables de 13,7 % de ces cas. Elles regroupent notamment l'hypertension artérielle gravidique (HTA gravidique), une élévation anormale de la pression dans les artères concernant 5 à 10 % des grossesses, les cardiomyopathies, qui provoquent des dysfonctionnements du muscle cardiaque, ou les dissections aortiques, un déchirement accidentel de la paroi interne de l'aorte.
La deuxième cause n'est autre que le suicide, qui représente 13,4 % des morts, soit environ une par mois. Un chiffre glaçant, qui témoigne de la détresse psychologique dans laquelle se trouvent celles qui donnent la vie, et du manque de soutien adapté dont elles souffrent.
Si le rapport se félicite de la baisse drastique du taux de décès par hémorragie obstétricale, "diminué par 2 en 15 ans", jusqu'ici la première cause de mortalité maternelle soulevée par l'ENCMM, il est toutefois formel : les pertes terribles qu'il continue d'observer pourraient en grande partie être empêchées avec un meilleur accompagnement.
"Dans 66% des cas, les soins dispensés n'ont pas été optimaux et 58% des décès sont considérés comme 'évitables' ou 'peut-être évitables' en améliorant la prévention, l'organisation des soins, et les soins eux-mêmes", attestent les institutions.
Autre constat déjà établi lors des enquêtes précédentes : les inégalités d'âge, de poids et de milieu social, entre autres, jouent un rôle tristement déterminant. Le risque de décès est ainsi plus élevé chez les femmes plus âgée (il est par exemple multiplié par 4 à partir de 40 ans), en situation d'obésité (24,2 % des morts maternelles sont survenues chez des femmes obèses), ou dont le contexte social est fragile (40 % des décès pour causes de suicides ou de maladie cardiovasculaire sont survenus chez des parturientes présentant au moins un critère de vulnérabilité socio-économique).
Pour permettre aux professionnel·le·s de santé de mieux agir et ce, rapidement, mais aussi aux femmes et à leur famille d'identifier des signes avant-coureurs si possible, le comité d'expert·e·s a mis au point "30 messages-clés" qui leur sont destinés. L'un d'eux souligne par exemple "l'importance de l'examen médical non strictement obstétrical de la femme enceinte et la recherche d'antécédents psychiatriques et addictologiques, et d'une vulnérabilité sociale", ou encore d'évaluer "des risques de complications avant la conception et en début de grossesse qui doit permettre une planification de la prise en charge de la grossesse individualisée."
Preuve s'il en fallait qu'ouvrir le dialogue entre patient·e·s et soignant·e·s est primordial, sinon salvateur.