"J'étais à bout de nerfs !". Interviewé par le Times à propos de sa nouvelle sitcom (où il incarne une père de famille agressif), l'acteur britannique Martin Freeman, célébré pour ses performances cultissimes dans The Hobbit et la série Sherlock (mais aussi la comédie romantique Love Actually) a avoué avoir déjà frappé ses deux enfants, à savoir Joe, 14 ans, et Grace, 11 ans. Par colère, explique-t-il, mais également par souci de "discipline". A y repenser, le comédien de 48 ans éprouve des regrets aujourd'hui. "Je ne suis pas fier d'avoir fait ça", dit-il. Mais si c'était à refaire, confesse-t-il cependant au journal british, et bien il le referait...
"L'une des grandes règles [quand vous êtes parent] est de ne pas gifler vos enfants et de ne pas les appeler 'les petits cons'. Mais, vous savez, j'ai fait les deux. Je les ai probablement giflés deux fois", développe avec une insouciance désarmante Martin Freeman, qui ne voit aucun mal à maltraiter, physiquement et verbalement, sa progéniture. Et l'interprète du docteur Watson de conclure, comme pour mieux appuyer sa "pédagogie" : "Cette croyance qui voudrait que l'on puisse raisonner un tout-petit ? Franchement, bonne chance".
L'air de rien, cet aveu du comédien aurait pu passer sous les radars, mais non : cette déclaration a remis au goût du jour le débat sur les fessées et autres gifles administrées aux enfants. Ainsi l'émission de télévision Good Morning Britain pose-t-elle sur son compte Twitter la question de but en blanc : "Est-ce OK de gifler ses enfants ?" Et alors que l'on pouvait s'attendre à un "NON" majoritaire, les points de vue accordés aux violences faites aux plus jeunes sont loin, très loin d'être "progressistes". Près de 66 % d'internautes jugent effectivement qu'une gifle est un geste tout à fait légitime. Dans les commentaires, certain·es internautes affirment même que les "corrections" que leur infligeaient leurs parents n'a en rien entaché leur vie.
Mais ces résultats alarmants ne laissent pas tout le monde insensible. "S'il n'est pas acceptable de recourir à la violence contre les adultes, pourquoi est-il acceptable de frapper des enfants, d'autant plus qu'ils ne sont pas en mesure de riposter ? Martin Freeman a admis qu'il l'avait fait en étant en colère... ce qui est encore pire !", fustige une internaute scandalisée. Une réaction légitime aux propos du comédien, pour qui le recours à la violence était "une erreur", dit-il, mais surtout une erreur "inévitable", si l'on en croit ses mots. Une déclaration plutôt ambiguë. Selon certain·es pourtant, il n'y a aucun débat à avoir. "Pouvons-nous simplement stopper ça, ce n'est pas affaire à débat. Arrêtez de frapper les enfants !", s'indigne en ce sens un autre internaute sur Twitter.
Alors que certains twittos détournent la question ("C'est OK si je frappe quelqu'un dans la rue ?", ironise un anonyme), d'autres voient là l'occasion idéale pour déboulonner des codes d'éducation "réac" qui perdurent malgré l'évolution des mentalités. "Bravo à Martin Freeman, qui démontre clairement qu'il est grand temps pour nous d'apprendre comment répondre à notre stress et notre fatigue au cours du voyage infini de la parentalité. Car tout cela conduit bien souvent à nourrir l'impatience, mais aussi des attentes irréalistes, lesquelles nous amènent à gifler nos enfants si ceux-ci ne s'y conforment pas", déplore à ce titre la "Super Nanny" anglaise Jo Frost.
Des mots qui ne sont pas dépourvus de sens. Car rappelons que si les châtiments corporels assénés aux enfants sont interdits en France, ce n'est pas encore le cas au Royaume-Uni. Il y a trois ans de cela, le Daily Telegraph déplorait ainsi de voir l'Angleterre conserver cette malheureuse "tradition", qui tend à ériger la fessée ou la gifle en "moyen légal de discipliner ses enfants" alors qu'il ne s'agit en vérité que d'un "traitement cruel, dégradant et humiliant". Preuve en est que le "débat" est loin d'être terminé.